31 décembre 2012

Tous mes faux raisonnements (ou presque)

Chaque lundi je te propose de t'alléger l'esprit d'un faux raisonnement, et voilà déjà 8 mois que dure ce régime. Je n'ai plus grand-chose à ajouter à ce sujet, mais attention : un régime équilibré n'a pas pour but d'être temporaire, c'est une habitude à prendre, un idéal à viser chaque jour par la pratique. Autrement dit, il faut y revenir quotidiennement.

Pour t'aider, voici un petit récapitulatif - incomplet malheureusement - de ce chemin parcouru ensemble (l'original en anglais ici). J'espère que ça te donnera envie de l'encadrer dans ton salon, ou de l'afficher sur la porte des toilettes, pour assainir les débats et les rendre plus productifs.



En prime, un petit poster qui pose les bases d'une discussion rationnelle.

28 décembre 2012

15 principes apologétiques selon G. Bahnsen

Greg Bahnsen (1948-1995)était un philosophe calviniste américain, et c'est probablement lui qui aura le plus vulgarisé les écrits de Cornelius Van Til, l'apologète réformé par excellence, en reprenant notamment son travail sur les présupposés, les faux raisonnements, et la démarche apologétique.

1. Défendre la foi chrétienne est une nécessité morale pour chaque croyant, nous devons être "toujours prêts" à rendre compte de notre espérance  (1Pi.3:15).

2. Pour éviter de faire fausse route, voilà ce que ça n'implique pas:

(a) d'être agressif,
(b) d'avoir comme objectif de persuader,
(c) de se fonder sur une autorité autre que la théologie.

3. Pour le chrétien, la raison devrait être un outil, et non l'autorité ultime de sa pensée. 

4. Notre affirmation devant le monde est que le croyant sait que la Bible est vraie - nous pouvons justifier notre acceptation de sa fiabilité par de bonnes raisons.

5. Le conflit entre croyant et non-croyant est ultimement un conflit de visions du monde différentes, c'est-à-dire différents ensembles de présupposés qui guident la réflexion et d'après lesquels toute expérience est interprétée

6. En conséquence, nous devons argumenter "l'impossibilité du contraire", c'est-à-dire montrer que seul le Christianisme contient les préconditions d'intelligibilité de toute expérience humaine et de tout raisonnement humain. Si le Christianisme n'était pas vrai, personne ne pourrait rien prouver, ni rien comprendre.

7. Les non-croyants se trompent eux-mêmes : ils connaissent la vérité au sujet de Dieu, mais ils la répriment en rationalisant les indices clairs présents en eux et tout autour d'eux. 

8. Celui qui se défend intellectuellement et moralement, en réalité, ce n'est donc pas Dieu, mais le non-croyant. 

9. Il y a une large gamme d'attaques du Christianisme, et on ne peut pas correctement y répondre en appuyant sa défense sur : 

(a) le subjectivisme (la connaissance ne relève pas de l'objet mais du sujet qui connaît),
(b) le relativisme (le sens et la valeur des croyances humaines n'ont pas de fondement absolu transcendantal),
(c) l'éclectisme (piocher à droite à gauche ce qui nous semble intéressant dans différentes philosophies).

10. Les apologètes doivent argumenter. Une argumentation qui honore Dieu n'est pas querelleuse, mais guidée par les exemples bibliques.

11. Un argument affirme la vérité d'une proposition en se fondant sur d'autres propositions vraies.

12.Une argumentation rationnelle ne se limite pas à la simple utilisation d'un raisonnement déductif par syllogisme.

13. Dieu souhaite que nous maîtrisions les outils de la rationalité pour défendre la foi chrétienne. C'est notre devoir de réfuter les attaques des non-croyants et de proposer une critique interne de la position philosophique dont l'attaque est issue.

14. Les deux péchés intellectuels que les gens commettent le plus sont : 


(a) l'incohérence,
(b) le jugement arbitraire.

15. Face à un non-croyant, le chrétien devrait être prompt à signaler les erreurs de pensée :  

(a) les conjectures préjudicielles,
(b) les partis pris philosophique non-justifiés,
(c) les présupposés qui sont incohérents entre eux,
(d) les faux raisonnements,
(e) les comportements qui vont à l'encontre des croyances proclamées.

24 décembre 2012

Faux syllogismes

Aussi appelés "sophismes", les faux syllogismes sont des raisonnements qui ne respectent pas les 4 règles de base de la logique déductive. Pour rappel, la déduction consiste toujours à passer de la règle générale à son application particulière de la manière suivante :

1. Si la catégorie A a la propriété B.
2. Et que C appartient à la catégorie A.
3. Alors C a la propriété B.

Voici les 2 sophismes qui sont les plus répandus :

- Désordre (1.3.2). Si la catégorie A a la propriété B, et que C n'a pas la propriété B, alors C n'appartient pas à la catégorie A. Sauf que la catégorie A n'a pas pour seule propriété B.

Ex : Si les mexicains ont tué Kennedy, alors ce sont des lâches. Mais il ne l'ont pas tué, donc ce ne sont pas des lâches.

Là c'est évident, mais si on prend un exemple plus courant, ça donne ça : Les gens religieux croient à des superstitions, mais toi tu n'es pas du genre à croire à des superstitions, alors tu ne peux pas être quelqu'un de religieux.

- Répétition (2.2.3). Si la propriété B appartient à la catégorie A, et que C appartient à la catégorie A, alors C a la propriété B. Sauf que la catégorie A n'a pas systématiquement la propriété B.

Ex : Si la personne qui a écrit Hamlet était un grand auteur, et que Molière est un grand auteur, alors il est la personne qui a écrit Hamlet.

Exemple plus courant : Si aller à l'église le dimanche est un truc de chrétiens, et que tu es chrétien, alors tu vas forcément à l'église tous les dimanches.

21 décembre 2012

Dis au revoir au Père Noël !

Puisqu'on a tous beaucoup à faire ces temps-ci, voici la version d'un poème de Glen Scrivener que j'ai traduit l'année dernière ici même sur ce blog.

J'espère qu'elle vous aidera à rappeler le sens de ce qu'on fête réellement, de manière créative et pertinente, au cours des longs dîners de Noël...

17 décembre 2012

Question complexe

Une forme voisine du faux raisonnement de question-piège est de poser une question qui implique une réponse complexe tout en exigeant une réponse simple et rapide. Bien sûr, on condamne l'interlocuteur s'il ne peut pas rapidement apporter de réponse simple.

Ex : Une amie chrétienne qui travaille comme serveuse se retrouve confrontée, au milieu de son service, à une question difficile, par une de ses collègues, non-chrétienne. "L'avortement, t'es pour ou contre ?". Cette amie a eu le bon sens de répondre que la question était complexe et méritait plus qu'une simple réponse à choix binaire. Si sa collègue avait condamné mon amie pour cette réponse, elle aurait commis le faux raisonnement de la question complexe.

Autrement dit, ce n'est pas parce qu'on nous présente un choix binaire qu'il faut l'accepter (et ça rejoint l'idée du faux raisonnement en noir et blanc).

14 décembre 2012

Un monde sans religion

Chassez le spirituel, il revient au galop. La Révolution Française a jeté à bas l'institution religieuse chrétienne, pour la remplacer immédiatement par le culte de la déesse Raison. Hegel, qui avait admiré en son temps cette Révolution, affirmait que le point culminant du progrès intrinsèque de l'Histoire serait le Weltgeist (“l'Esprit du monde”) – ou l'Esprit Absolu : Il prêtait à l'Histoire une volonté, un but conscient de liberté vers lequel elle tendait inexorablement.

Feuerbach quant à lui partit dans la direction opposée avec l'idée que l'Histoire est le développement de la matière, et non de l'esprit (ou de l'idée). Selon lui, la religion est simplement “le rêve de l'esprit humain”.

Karl Marx, influencé par Feuerbach, prôna un socialisme radical qui bannissait l'idée de Dieu. La religion n'était pour lui que “l'opium des masses”. De telles illusions devaient être éradiquées en faveur d'un monde rationnel où les hommes résolvent leurs problèmes sans intervention “extérieure”.

Une telle hostilité à la foi religieuse a pris forme physique en Russie après la Révolution de 1917. Le pays sera le cobaye du socialisme scientifique. Un ultime culte religieux fut célébré dans les murs du Kremlin en octobre 1917, et officiellement il n'y en aura plus jusqu'en 1990. A cette date, Mikhail Gorbatchev, alors chef d’État, déclarait que la Russie était en grave déclin spirituel.

En parallèle à un revirement politique récent vers le socialisme, on assiste aujourd'hui en France à un retour similaire au spirituel – si Dieu est mort, il est ressuscité. On peut, par la loi, imposer un cadre athée aux nations, mais on ne peut pas le vivre : les hommes ont toujours cherché Dieu aussi ardemment qu'ils l'ont fui.

10 décembre 2012

Exagération

L'exagération est un démon à mille visages : amplification, généralisation, caricature, dramatisation, victimisation, simplification, totalisation, etc. C'est un faux raisonnement qui étoffe les faits et l'environnement du raisonnement pour faire un raccourci jusqu'à la conclusion et ainsi éviter toute contestation.

Généralement exprimés sous la forme de vérités générales, sur un ton catégorique, et/ou comme un jugement péremptoire.

Ex : Avec toi, c'est toujours la même chose... peu importe ce qui vient après ça, la personne a déjà décidé que ce qu'elle vous reproche tombe dans la catégorie de ce qui a déjà été déclaré coupable chez vous, et fait donc l'économie du jugement, d'explications, bref, d'un procès équitable.

7 décembre 2012

La Bible est un lion

On entend dire que la Parole de Dieu n'a pas plus besoin d'être défendue qu'un lion en cage. Il suffit de relâcher le lion, et il se débrouillera très bien ! Tout dépend de ce qu'on entend par là. 

Il faut distinguer deux choses : ce que Dieu attend de nous parce qu'il en a besoin (rien!) et ce que Dieu attend de nous parce qu'il nous le demande. Évidemment que Dieu n'a pas besoin d'aide, et encore moins de la nôtre, mais pour une raison incompréhensible, il décide de nous demander de l'aide néanmoins. Il veut nous faire participer à ses projets.

Dire que la Bible n'a pas besoin d'être défendue peut inciter à penser qu'on n'a pas besoin de faire d'effort pour adapter l'annonce du message de Jésus à nos voisins, et l'expliquer. Ce serait comme de dire que Dieu n'a pas besoin d'évangélistes, ou que, puisque Dieu pourvoit, on n'a pas besoin de travailler. Dieu ne se contente pas d'objectifs, il pourvoit aussi les moyens de les atteindre, ou, comme on dit : Ce que Dieu ordonne, il le coordonne

Les moyens mis à disposition par Dieu sont entièrement cohérents avec les objectifs, et sachant que l'objectif ultime est de rendre gloire à Dieu et de trouver en lui tout son bonheur, il ne faut pas se contenter d'inaction en pensant que Dieu s'occupe de tout. Le monde est le chantier de Dieu, mais ce n'est pas le seul : chaque chrétien est également le chantier de Dieu, et c'est principalement en opérant dans et par ce second chantier (le chrétien) qu'il opère dans le premier (le monde).

La Bible est la parole de Dieu et en tant que telle, elle est la vérité. La vérité nous est donnée comme une flamme, une lumière qui permet d'éclairer le monde et de le comprendre. Et si cette flamme ne peut être éteinte, on peut néanmoins la recouvrir d'un seau. Défendre la Bible, c'est empêcher cela, pour qu'elle brille fort et loin à la vue de tous.

Comment procéder ?
La Bible elle-même nous incite à l'utiliser pour exposer la vérité face à l'erreur, mais pas n'importe comment (1Pi.3:15). D'abord, Dieu nous commande de répondre, pas de prendre l'initiative constamment, néanmoins il nous commande aussi d'être toujours prêts. Prenons donc l'initiative dans les raisonnements, mais pas forcément dans les discussions. Ensuite, il nous dit de répondre avec douceur et respect, il ne s'agit pas d'être sur la défensive ou de se lancer dans une discussion agitée. 

Dieu n'attend pas non plus de nous que nous convainquions qui que ce soit. Le but n'est pas de faire du prosélytisme. Nous pouvons être réfléchis, pertinents, logiques, en un mot convaincants, c'est là l'objectif, et non de convaincre en soi. C'est Dieu qui convainc. 

Enfin, il ne faut pas imaginer que de défendre la foi chrétienne implique une autorité autre que celle de Dieu et de sa Parole. On pense parfois qu'il faut que le chrétien et le non-chrétien s'accordent à débattre ultimement sous une autorité normative, extérieure, commune, comme la Raison humaine. Défendre la Parole de Dieu nécessite avant tout que notre esprit soit vivifié par Dieu, c'est de lui qu'il tirera sa vigueur, sa pensée et ses raisonnements. La raison est utile, c'est un outil sous l'autorité de Dieu, mais ce n'est pas l'autorité elle-même, car on ne peut soumettre à notre raison une entité qui lui est supérieure.

3 décembre 2012

L'absence de preuve

Comme on dit, l'absence de preuve n'est pas une preuve de l'absence. Mais il ne suffit pas de dire ça, car ce serait interdire tout esprit critique au nom d'une pseudo-liberté de croyance (qui ne serait qu'un caprice de l'imagination).

Par exemple, rien ne prouve que les licornes ne sont pas invisibles et intangibles - ce qui expliquerait pourquoi on n'a aucune preuve de leur existence. Mais il s'agit là d'une pure invention destinée à justifier un fantasme - on doit se poser la question : d'où vient l'explication ? Autrement dit, d'où viennent les bonnes raisons qui nous poussent à croire malgré l'absence manifeste de preuves ?

Pour prendre l'exemple qui nous intéresse ici, l'absence apparente de preuve de l'existence et de l'action de Dieu dans l'Histoire de l'humanité ainsi que dans la vie quotidienne ne constitue pas une preuve de son inexistence ou de son inaction. D'où en vient l'explication ? Du texte biblique, qui est une source historique fiable. Mais en plus de dire que Dieu est esprit (ce qui explique qu'on ne peut le percevoir comme on perçoit le reste du monde) et qu'il se cache (parce que sinon on mourrait à son contact), le texte biblique témoigne aussi de l'action de Dieu dans l'Histoire de l'humanité - et constitue alors une preuve. Mais on ne s'accordera pas sur ce point sans approfondir le débat.

Cela, pour deux raisons simples :

- D'une part, nous avons vu qu'il faut s'accorder sur ce qu'est une preuve,

- D'autre part, il se peut que le problème ne soit pas l'absence de preuve mais la diversité de nos interprétations de ces preuves, selon nos présupposés, et qui nous font penser que la bible prouve effectivement quelque chose, mais que ça n'a rien à voir avec Dieu.

Et ça, ça ne peut pas se faire ici, malheureusement. Seulement face à face arrivera-t-on à quoi que ce soit, car même si ma logique était parfaite, il faut plus que la logique pour convaincre les gens. Il faut du temps, il faut qu'ils voient la passion de l'orateur pour son sujet, il faut qu'il soit un témoignage vivant de son message. Il faut avoir de l'estime pour l'autre et une confiance personnelle, et il faut du temps. Alors je vous invite, chrétiens et non-chrétiens, à vous fréquenter et à dialoguer de tout ça, parce qu'au final, l'un de nos deux bords vit dans un mensonge, une illusion, et il faudra de l'aide pour en sortir.

30 novembre 2012

L'impossible contraire

Selon Cornelius Van Til, il y a un moyen simple d'évaluer une vision du monde (c'est-à-dire un système de présupposés), et c'est d'en examiner deux choses :

- La cohérence entre des éléments qui la constituent,
- La correspondance de ces éléments à la réalité.

Pour la cohérence interne, on regarde s'il n'y a pas de contradiction inhérente au système, de faux raisonnement, etc. Par exemple, si la vision du monde d'une personne l'amène à rejeter l'idée de libre-arbitre (c'est-à-dire que tous nos choix seraient déterminés par des facteurs extérieurs) mais qu'au niveau politique cette même personne milite pour qu'on reconnaisse à chacun le droit de faire ses propres choix, c'est incohérent, et la vision du monde de cette personne est à revoir.

Pour la correspondance à la réalité, on regarde si la vision du monde permet de comprendre l'expérience humaine, de manière logique, scientifique, et au niveau éthique. Par exemple, une vision du monde qui présuppose l'absence d'ordre et de stabilité du monde empêche de donner un quelconque sens à la vie, ou le développement d'une quelconque science.

Le christianisme affirme que toutes les visions du monde qui ne sont pas bibliques sont fondamentalement incohérentes ou qu'elles ne correspondent pas à la réalité. Seule la vision chrétienne comporterait les présupposés pour expliquer l'intelligibilité du monde, les postulats nécessaire au raisonnement humain, à son expérience, à sa dignité. Si c'est le cas, on peut s'assurer de la vérité de la vision du monde chrétienne en réfutant toutes les autres visions du monde.

D'autres théologiens ont vulgarisé et actualisé l'approche de Van Til, notamment  Francis Schaeffer et Greg Bahnsen. N'hésitez pas à explorer leurs écrits !

26 novembre 2012

Le juste milieu

Lundi ? Vrai. Raisonnement ? Faux. Il est temps de changer...

Le raisonnement du juste milieu consiste à penser qu'un compromis, un "juste milieu" entre deux extrêmes est la vérité. Parfois, la vérité est effectivement au juste milieu, mais ce n'est pas systématique : un "juste milieu" entre le vrai et le faux reste faux.

En outre, il y a souvent plusieurs manières de tracer une ligne entre deux points de vue, et donc plusieurs "milieux".

Exemple :

A - Il y avait 3000 manifestants selon la police.
B - Oui, mais d'après les syndicats, il y en avait 5000.
A - Les deux exagèrent toujours. Il y en avait surement 4000.

En réalité, il y en avait peut-être 3000, peut-être moins, peut-être 5000, peut-être plus, on ne peut pas savoir à partir de ça. Au mieux, si on se fie à la fourchette évoquée, on peux supposer de bonnes raisons qu'il y en avait entre 3000 et 5000.

23 novembre 2012

Comment savoir si Dieu existe ?

On peut savoir s'il y a du lait dans le frigo en allant simplement regarder. On peut savoir si fumer accroît les risques de cancer en faisant des tests. Si on est en désaccord sur ces points, on peut se mettre d'accord assez facilement en vérifiant les faits, mais ce n'est possible que parce qu'au fond, on s'accorde sur des choses plus élémentaires : la fiabilité de nos sens, l'uniformité des phénomènes naturels, la fiabilité des données recueillies, l'honnêteté des chercheurs, etc. C'est ce qu'on appelle des présupposés.

Savoir si Dieu existe est problématique non pas parce qu'il y a un désaccords sur les faits, mais sur les présupposés. On gagne donc à aller plus au fond du débat, pour éviter de batailler en surface et en vain. Seulement, à ce niveau, les faits observables ne constituent plus des éléments décisifs. En effet, les mêmes présupposés qui déterminent ce qu'une personne va accepter ou non comme faits déterminent également comment ces faits seront interprétés.

Par exemple, le naturalisme et le surnaturalisme portent deux regards différents sur le monde et la connaissance que l'homme en a :
  • Le naturalisme affirme qu'il n'y a rien au-delà de la Nature, et donc rien en dehors de la Nature qui puisse expliquer l'ensemble de l'expérience humaine.
     
  • Le surnaturalisme affirme qu'il y a quelque chose au-delà de la Nature, qui peut expliquer l'ensemble de l'expérience humaine. Par exemple, Dieu, qui a créé la Nature et intervient en son sein à chaque instant, pour la maintenir ou la modifier et ainsi y opérer des miracles.
Il ne suffit dès lors plus d'avoir de bonnes preuves qu'un phénomène miraculeux est arrivé pour convaincre un naturaliste, puisque ce dernier supposera que cet événement n'est pas réellement arrivé, ou qu'il est simplement inexpliqué et non inexplicable. De la même manière, aucun fait, aucune preuve tangible ne pourra jamais convaincre un Hindou qu'il se trompe en croyant que toute l'expérience humaine est une illusion.

L'ensemble de nos présupposés constituent une certaine vision du monde – des convictions fondamentales sur le bien, le mal, le sens de la vie. Nous ne tirons pas entièrement ces présupposés de notre expérience humaine, et ils ne peuvent pas être vérifiés ou réfutés par la science naturelle.

La plupart des gens ignorent qu'ils ont des présupposés, et une vision du monde conditionnée par ces présupposés. Ils n'y réfléchissent donc pas de manière explicite, ce qui peut rendre tout débat difficile, voire inutile, du moins avant d'avoir éclairci ces questions. Nous verrons la semaine prochaine comment nous y prendre.

19 novembre 2012

Origine contrôlée

Faux raisonnement du matin, chagrin... vidangez-vous l'esprit ce lundi en le purgeant un bon coup !

Le principe de l'origine contrôlée, c'est d'évaluer la validité d'un argument en fonction de son origine. On fait ainsi appel aux préjugés qu'ont les gens. Similaire à l'attaque personnelle, ce faux raisonnement vise la source ou le contexte de l'affirmation.

Exemple :

A - Les homosexuels sont tout-à-faits capables d'aimer des enfants comme leurs propre parents. 
B - Bien sûr. Mais les psychologues sont formels : pour le bon développement de l'enfant, il lui faut un père et une mère, un parent qui lui permet de se comprendre par similarité, et un parent par lequel il se comprend par différence.
A - Les psychologues qui disent ça sont chrétiens ! Ils sont forcément biaisés. Il y en a d'autres qui disent le contraire, que c'est pas important.
B - Et ceux-là sont homosexuels.

En plus d'être réducteur, ce raisonnement ne mène nulle part.

16 novembre 2012

La différence entre toi et moi

Tu diras probablement que je suis un “croyant” et que tu es un “non-croyant”. Et de nombreux chrétiens seraient d'accord avec ces labels - après tout, ils sont bibliques. On peut dire que ce qui sépare les chrétiens et les athées, c'est la foi.

C'est une question de croyance...
Les Chrétiens croient certaines choses que les athées ne croient pas. Les premiers croient que les affirmations de Jésus-Christ et que les enseignements de la Bible sont vrais, les seconds ne le croient pas. Les premiers ont foi en Jésus et ont confiance en ses promesses, pas les seconds. Devenir chrétien implique de croire.

...mais pas seulement.
La différence ne s'arrête pas à la croyance, et c'est important à comprendre si on veut en parler en évitant les idées reçues. La croyance en la fiabilité de la Bible et la foi en Jésus sont des éléments qui ressortent le plus dans notre religion, mais le chrétien affirme plus que simplement une croyance en la vérité des affirmations de Jésus.

Le chrétien affirme qu'il “sait” que ces affirmations sont vraies. Au-delà de l'espoir ou de l'engagement de notre volonté, qui font partie de la foi, il y a le savoir.

Qu'est-ce que ça veut dire ?
Comment le savoir dépasse-t-il la croyance ? Le savoir implique d'avoir une justification, ou des bonnes raisons pour soutenir ce que l'on croit. Si on me demande quelle taille fait ma ville, que je réponde au hasard, et que je tombe juste, pourrait-on dire que je savais ? Non, parce que je n'avais aucune justification pour ma réponse. 

Quand on affirme savoir que quelque chose est vrai, on affirme avoir des indices sérieux, des faits, ou de bonnes raisons pour appuyer notre avis.

La vraie différence
Je crois quelque chose que tu ne crois pas, mais ça ne suffit pas de dire ça, car on peut avoir des croyances sans fondement, hasardeuses, ou futiles. J'affirme qu'il y a de bonnes raisons de croire ce que je crois, et tu affirmes qu'il n'y a pas de bonnes raisons de croire ce que je crois, voire qu'il y a de bonnes raisons de ne pas croire ce que je crois.
Les discussions sur la foi chrétienne devraient être une étude de cette question, ainsi qu'un débat à ce sujet, et ça implique de donner des arguments, de justifier des points de vue, de réfuter des positions erronées et de répondre aux objections. C'est ce que j'essaye de faire dans la vie, et sur ce blog, ayant constaté que l'écrit permet de considérer les idées souvent plus calmement, et de les diffuser plus largement.

12 novembre 2012

Prétention de neutralité

Il arrive souvent que dans un débat, on se retrouve en face d'une personne qui prétende être un observateur neutre et objectif et nous reproche notre propre subjectivité. Autrement dit, on ne ferait que chercher à se justifier, motivé par une angoisse personnelle, tandis que son discours à lui se fonderait sur la raison, les faits et la logique.

Il faut rejeter ce faux raisonnement. D'une part personne n'est entièrement neutre et objectif, d'autre part, l'objectivité de l'observateur extérieur et neutre est un mythe : un observateur extérieur et neutre ne pourra jamais comprendre l'amour, ni en parler avec justesse (c'est un exemple, il n'est pas forcément nécessaire de faire l'expérience d'une chose pour en juger, pas besoin d'être un violeur pour savoir que c'est mal de violer).

Exemple : On entend souvent cette doctrine “Il faut traiter toute affirmation comme une hypothèse à tester en fonction des faits – cohérence logique et observation empirique”. Le but recherché est manifestement d'éviter l'argument circulaire ou la fausse question. Mais cela implique que le seul moyen fiable de déterminer la validité et la vérité d'une affirmation est de l'analyser d'un point de vue logique, rationnel et factuel. Or, si on applique ce principe à cette dernière affirmation, comment le maintenir ?

Autrement dit, comment prouver que le seul moyen fiable de déterminer la validité et la vérité d'une affirmation est de l'analyser d'un point de vue logique, rationnel et factuel ? Si on le fait logiquement, rationnellement, de manière factuelle, on tombe dans le raisonnement circulaire. Si on le fait d'une autre manière, on réfute l'affirmation elle-même.

Il ne s'agit pas de rejeter la logique, la raison, ou les faits – simplement, une telle position n'est pas prouvable, c'est quelque chose qui précède la réflexion ou l'argumentation même, c'est un élément de notre vision du monde... c'est ce qu'on appelle un présupposé.

Ici, ce présupposé rejette toute possibilité d'explication surnaturelle, même si elle est appuyée par des indices factuels. Il est donc interdit de prouver l'existence surnaturelle de Dieu par des explications surnaturelles... autrement dit, il est impossible de prouver l'existence de Dieu. Le chrétien aura un présupposé opposé, et on ne peut pas lui interdire dans le débat sous prétexte qu'on préfère son propre présupposé, ce serait malhonnête.

Pour clarifier : un présupposé, c'est une conviction profonde sur la réalité, l'homme, la vérité, le monde, la connaissance, etc. et c'est à partir de ces convictions qu'on perçoit, analyse et organise toute nos expériences humaines.

9 novembre 2012

Fait, indice et preuve

On entend souvent parler de “preuve”, notamment pour l'existence de Dieu. Mais qu'est-ce qu'une preuve ? Une preuve permet de savoir, d'être sûr à 100%, qu'une affirmation est vraie... Mais existe-t-il jamais une telle preuve ?

Dans une enquête policière, on constate une situation, qu'on cherche à expliquer. Pour cela, on cherche et on trouve des faits, des traces laissées par les événements (marques, empreintes, etc.). En analysant ces faits, on cherche ce qu'ils indiquent, et cela donne des indices – c'est le premier niveau d'interprétation.

Ensuite on essaye de trouver une explication qui intègre ces indices de manière cohérente, et on détermine les indices indispensables pour soutenir cette explication. C'est le deuxième niveau d'interprétation.

On présente ces derniers comme pièces à conviction, et elles ne deviennent des preuves qu'une fois que le jugement est rendu, autrement dit une fois que l'ensemble des faits analysés, sélectionnés et organisés de manière cohérente sont reconnus suffisants pour valider l'explication minimale des faits.

Alors existe-t-il des preuves de l'existence de Dieu ? D'après cette définition des choses, non. Il existe des faits, sur lesquels tout le monde s'accorde, il y a quelques débats sur ce qu'ils indiquent, et de nombreux débats sur ceux que l'on peut sélectionner et la manière de les organiser pour arriver à une explication.

Pourtant, la question est largement débattue, notamment dans le  monde anglo-saxon, où elle est formulée ainsi :Is there evidence for God's existence ?”. Le mot “evidence” recouvre aujourd'hui l'ensemble des notions de trace, indice, pièce à conviction, et preuve, notamment dans ce débat. Certains reprennent le terme anglais, et parlent d'évidence – à mon sens c'est une erreur doublée d'un barbarisme de langage, car comment s'attendre à être compris en parlant de l'évidence de l'existence de Dieu quand justement, ce n'est pas évident pour les autres ?

Je préfère personnellement parler de traces, pour trois raisons :
  • D'abord parce qu'il y a une notion de recherche et d'interrogation, on suit des traces, alors que les “preuves” nous forcent la main (ce qui est problématique dès lors qu'elles sont illégitimes, et elles le sont souvent a priori);

  • Ensuite parce que les traces évoquent une réalité entre les faits et les indices : elles présupposent que les faits indiquent quelque chose, mais se situent encore au moment de l'interprétation, pas après. Ainsi on invite ceux qui nous écoutent à réfléchir avec nous, et à participer à cette recherche.

  • Enfin, parce qu'il ne s'agit pas seulement de l'existence de Dieu, mais de son action. Dieu n'est pas, du point de vue chrétien, juste une cause première, ou un Grand Horloger qui observe sans intervenir – il vit, agit, et intervient dans l'histoire du monde et de l'humanité ainsi que dans nos vies, et ça laisse des traces.
Il ne faut pas tomber dans une polémique où, faute de définir les termes, on s'embourbe et chacun campe sur ses positions. Il y a dans notre monde les traces d'un autre monde, d'une autre réalité. Nous sommes dans le sillage de Jésus – sa vie, son œuvre ont définitivement révolutionné le monde entier comme jamais rien ni personne auparavant, et rien ni personne depuis. La moindre des choses est de ne pas se précipiter dans le débat sans définir les termes ou une certaine méthodologie.

5 novembre 2012

Fausse question !

Trois personnes prennent une chambre dans un hôtel. A l'accueil, on leur dit que le prix pour la nuit est de 30€. Le calcul est simple, chaque personne paye 10€. Ils montent ensuite dans leur chambre. Puis la réceptionniste se rappelle qu'il y a une promotion spéciale cette semaine : la chambre n'était qu'à 25€. Elle charge donc le garçon de chambre de rapporter 5€ aux trois hommes. En chemin, il se demande comment diviser 5€ en trois, et décide finalement de se prendre un pourboire de 2€, facilitant la division du reste entre les 3 clients. Quand il leur remet l'argent, chacun récupère donc 1€.

La question est la suivante : au final, chacun a payé 9€, soit 27€ à trois. Si on ajoute les 2€ pris par le garçon de chambre, on arrive à 29€. Et pourtant ils ont payé 30€ à l'origine. Où est passé l'euro restant ?

La solution est simple : il n'y a pas d'euro restant. Les 2€ du garçon de chambre ne sont pas à ajouter aux 27€ payés par les clients, mais à retirer, ce qui amène à 25€, le prix de la chambre.

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Ce raisonnement est ici le bon. Mais on utilise ce même raisonnement à tort pour éviter de répondre à une question dérangeante. Autour d'un repas avec des amis et notamment JR, qui est d'une logique implacable, nous discutions de la justice. Et un ami de dire à JR : “C'est quoi la justice ?”, puis, alors que ce dernier commence à répondre, il l'interrompt pour dire : “Chacun a sa notion du bien et du mal, et au final, il n'y a pas de justice en soi.”

Autrement dit, on ne peut pas demander à quelqu'un de définir quelque chose pour tout de suite revenir sur l'existence même de cette chose (à moins que, a terme et après examen, la définition donnée soit absurde), parce qu'on déplace la question et on empêche l'autre d'argumenter. C'est déstabilisant, frustrant, et manipulateur (qu'on s'en rende compte ou non). Bref, mieux vaut commencer par dire qu'il n'y a pas de justice, suite à quoi, au vu d'un désaccord, on peut chercher à atteindre une idée commune de justice, et s'accorder sur son existence ou inexistence.

2 novembre 2012

Dieu est amour

Dieu est amour, c'est vrai, mais Dieu n'est-il qu'amour pour autant ?

Ma maman que j'aime...

Ma mère est-elle une bosseuse ? Oui. Elle se donne a fond pour son boulot et pendant mon enfance, elle rentrait généralement tard le soir. Mais n'est-elle qu'une bosseuse ? Non, elle a aussi un sens de la famille, et c'est pour ça que même si elle rentrait tard, elle insistait pour qu'on mange tous ensemble, en famille.

Si je vous dis que ma mère est travailleuse sans équilibrer son portrait en mentionnant ses autres qualités, vous aurez une idée faussée d'elle – peut-être même que vous vous direz que c'est une mauvaise mère, qui s'intéresse plus à son travail qu'à ses enfants. Et pourtant, si vous saviez !  Elle a toujours fait passer ses enfants avant tout le reste.

Inversement, si je vous dis qu'elle fait toujours passer ses enfants avant elle-même, vous pourriez imaginer une femme épuisée à force de privations, vous ne sauriez rien de ses autres qualités : sa persévérance, sa diplomatie, sa jovialité, son attention aux détails, sa perspicacité, son humour, sa capacité à prendre sur elle et à pardonner, et mille autres choses qui font la richesse de son humanité.

Mon Dieu que j'aime...

De la même manière, si on dit que Dieu est amour, et qu'on en reste là, on aura une image faussée de Dieu. En rester là, c'est dire que Dieu n'est qu'amour, et donc que l'amour, c'est Dieu. Bien sûr, on pourrait définir les termes du débat, et voir que l'amour tel qu'on l'imagine et tel qu'on le vit entre humains n'a rien à voir avec ce que la Bible définit comme amour, mais ça n'est que moyennement satisfaisant, car dès lors qu'on embraye sur la Bible, ça réintroduit un Dieu qui est plus que juste amour.

Alors, oui, Dieu est amour, mais Dieu est aussi juste. Et c'est ce qui nous intéresse en particulier, puisque c'est à cela que s'oppose l'idée d'un Dieu qui ne serait qu'amour, un Dieu qui ne nous dirait pas ce qui est juste, et ce qui ne l'est pas, bref, un Dieu qui ne serait pas un juge du bien et du mal.

Dieu est amour et c'est justement ça qui motive et équilibre sa justice. Dieu est amour donc il nous dit qu'on devrait changer, arrêter de pratiquer le mal dont on est l'auteur – le mensonge et l'hypocrisie pour commencer. Dieu est amour donc Dieu est juge. Il est bien placé, il est l'auteur de tout ce qui existe, nous compris. Mais mieux encore, Dieu est amour donc il nous aide à changer – il ne se contente pas de nous dire “arrête de mentir”, il nous accompagne, est patient avec nous, nous apprend à dire la vérité, nous en donne envie, et même nous apprend à la valoriser et la défendre.

Bref, Dieu est amour, et donc il est aussi juste, sage, vrai, bon, saint, tout-puissant, éternel, infini, et immuable.

29 octobre 2012

Du lait dans le frigo

On imagine que pour déterminer si une chose existe il faut se fonder sur des faits, qu'on peut répondre à toutes les questions qui concernent l'existence ou la non-existence de cette manière. Mais, en plus d'être simpliste, c'est faux.

L'existence, le caractère factuel, la réalité de différentes choses n'est pas toujours établie ou réfutée de la même manière.

On peut se demander “Est-ce qu'il y a du lait dans le frigo ?” et on saurait comment répondre à cette question. Mais on ne procèderait pas du tout de la même manière pour déterminer l'existence de la pression barométrique, d'un quasar, de la force de gravité, de l'élasticité, de la radioactivité, d'une loi naturelle, ou encore d'un nom, de la grammaire, d'un nombre, et même de la ville dans laquelle on habite, d'événements passés, de possibilités à venir, des lois de la logique, d'obligations politiques, de l'identité individuelle dans le temps, du principe de cause à effet, des souvenirs, des rêves, voire de l'amour ou de la beauté...

Il y a des milliers de choses dont on peut chercher à déterminer l'existence factuelle, et on ne procèdera pas pour toutes de la même manière.

Il suffit pour ça de voir les différences de méthodologie argumentative et des types de preuves utilisées par les biologistes, les grammairiens, les physiciens, les mathématiciens, les avocats, les journalistes, les mécaniciens, les marchands, ou les artistes. Le domaine en question servira à chaque fois de cadre, et c'est selon ce cadre qu'on déterminera la manière de répondre à la question.

Ex : L'existence de Dieu. C'est une question qui concerne une entité métaphysique, et on ne peut pas savoir si Dieu existe comme on peut savoir s'il y a du lait dans le frigo. Il faut réfléchir un peu, et c'est justement tout ce que propose ce blog. 

Les semaines à venir, nous allons nous y intéresser plus spécifiquement.

26 octobre 2012

Face à la violence, que faire ?

Deux fois en peu de temps, des amis se sont confiés à moi au sujet d'une situation violente qui les a troublés, et devant laquelle ils se sont retrouvés désemparés, comme toutes les autres personnes présentes.

Une jeune femme, d'abord, qui en a vu une autre se faire brutalement malmener dans la rue par un homme, et qui était atterrée de l'absence de réaction de la foule environnante. Elle-même a eu peur d'intervenir, étant une fille, et ne se sentant manifestement pas soutenue par d'autres.

Plus grave, un ami me raconte qu'il voit une voiture s'arrêter dans la rue, une femme en sort en criant et en cherchant à appeler la police avec son portable. Un homme de l'autre côté de la voiture, l'attrape violemment et la force à rentrer dans la voiture, puis s'allonge sur elle pendant qu'elle se débat. Étranger, et déstabilisé par l'absence de réaction des passants qui se contentaient de regarder, il hésite à intervenir. Un homme lui dit "C'est la vie ! C'est la vie...". Le presque-viol public prend fin, la voiture redémarre, rideau.

Ces deux amis s'en voulaient. Ils ne comprenaient pas pourquoi personne ne faisait rien, et encore moins pourquoi eux-mêmes n'avaient rien fait. Je vais t'expliquer pourquoi comme je leur ai expliqué, et je vais te recommander ce que je leur ai recommandé pour faire face à ce genre de situation de la manière la plus sûre et efficace possible.

Pourquoi personne ne fait rien, ou l'effet de diffusion

Les chercheurs en psychologie sociale ont beaucoup écrit depuis le cas d'école que fut le meurtre de Kitty Genovese dans les années 1960, malgré le fait qu'il ait été largement exagéré et ne corresponde en réalité pas à l'effet décrit. Pourtant, l'effet existe réellement et a depuis été observé au cours d'expériences sociales.

Le principe, c'est qu'un groupe en présence d'une personne en danger a généralement besoin d'un leader pour réagir. Sans leader, personne ne prend de risque, personne ne prend de responsabilité. Et plus le groupe est grand, plus la responsabilité individuelle est diffuse. Cela semble contre-intuitif, mais en fait, plusieurs mécanismes psychologiques sont à l’œuvre, et notamment les deux raisonnements suivants :

- "Il y a surement quelqu'un d'autre de mieux placé que moi pour intervenir".

- "Si personne ne réagit, c'est peut-être qu'il ne faut pas réagir".

Comment réagir

Il FAUT réagir. TU dois réagir. Dieu ne t'a pas placé sur terre pour que tu doutes ou que tu aies peur, il t'a placé là où tu es pour que tu sois comme lui : juste, plein de compassion, et que tu haïsses le mal, que tu interviennes pour libérer les opprimés, et que tu défendes ceux qui ne peuvent pas se défendre. C'est dangereux, et ça fait peur, mais c'est ta responsabilité de créature faite à l'image de Dieu, et encore plus en tant qu'enfant de Dieu, pour l'amour duquel il a connu la torture et la mort.

Mais tu es probablement faible, comme la plupart des gens. Certainement pas aussi faible que la victime, mais probablement plus faible que l'agresseur. Dans ce genre de situation, comment peux-tu intervenir si tu es faible ? C'est très simple, il te faut du pouvoir. Et tu ne t'en rends peut-être pas compte, mais il y en a partout autour de toi.

Pourquoi les pharisiens et les saducéens n'ont pas lapidé Jésus plus tôt ? Parce qu'ils avaient peur de la foule. Et pourquoi n'ont-ils pas mis Jésus à mort eux-mêmes ? Parce qu'ils avaient peur du gouvernement Romain.

Tu as certainement un téléphone portable. Sors-le, compose le 17, et avance-toi vers l'agresseur en criant que tu appelles la police. Si tu n'obtiens pas de réaction, prends autorité sur la foule, car l'effet de diffusion sera brisé dès que tu responsabiliseras les gens.

Tends ton téléphone à quelqu'un pour qu'il parle à la police, dis-lui de relever la description de l'agresseur (aspect physique, plaque d'immatriculation s'il y a lieu), demande de l'aide à une ou deux personnes imposantes pour attraper la personne violente, et à une autre personne d'éloigner la victime pendant que vous maintiendrez l'agresseur à distance. Et ensuite, fonce. Un conseil : ne cherche pas à être violent, tu ne sais pas où ça peut mener. Il vaut mieux chercher à ceinturer la personne violente que de la frapper, surtout si vous avez l'avantage du nombre. Le but est d'immobiliser l'agresseur jusqu'à l'arrivée de la police.

Le résultat

Ceci étant dit, il faut être prudent (l'agresseur peut être armé) et aussi savoir que la victime peut se retourner contre toi, ou contre vous. Parfois les relations de couple sont malsaines au point que la femme victime pense mériter cette violence, la trouve normale, ou même préfère s'en tirer seule. Pourtant Dieu ne nous tient pas à une obligation de résultat - il ne veut pas que nous réussissions à faire, il veut que nous réussissions à être, et être comme lui. Il ne passerait certainement pas son chemin...

Peut-être que, comme dit mon père, ça ne changera que le lieu des agressions. Mais le but de l'intervention n'est pas de changer le monde, c'est de vivre en accord avec qui on est, d'être ceux que Jésus a fait de nous. Et quand bien même ça ne changerait que le lieu, c'est déjà ça : que les gens violents qui abusent des faibles sachent qu'ils doivent se cacher, qu'ils aient honte, c'est déjà une victoire. D'un autre côté, tu risques d'être blessé, voire tué. Évidemment ça dépend de chaque situation, mais c'est à considérer. Tiendras-tu alors à ta vie plus qu'à être comme Jésus ?

Que Dieu te donne le courage d'assumer qui tu es, et qu'il te garde dans ces situations.

10 octobre 2012

L'Ambiguïté

Et Dieu dit : "Que le lundi soit". Et le lundi fut. Il y eut un soir, il y eut un matin. L'auteur avait beaucoup à faire, et attendit le mercredi pour publier son article... Avec mes excuses, voici le retour de la série sur les faux raisonnements.

On peut toujours s'en sortir. Et plutôt que de chercher du contenu, autant s'en prendre au contenant : jouer sur les ambiguïtés de langage, les quiproquos, utiliser les différents sens d'un mot ou d'une expression, pour manipuler la vérité.

A - Je t'avais demandé de sortir les poubelles.
B - Oui, je l'ai fait.
A - Et celle de la salle de bain ?
B - T'avais pas précisé lesquelles. "Les poubelles", c'est un terme générique...

C'est généralement facile à repérer, on appelle aussi ça de la mauvaise foi. Et, accessoirement, ça permet de s'en sortir quand on voit qu'on s'est planté : en insistant pour ne pas avoir tort en disant que, techniquement, on a raison.

5 octobre 2012

Petit guide de la sexualité

J'ai déjà abordé le sujet il y a deux ans, mais cette fois-ci j'en parlerai au sens large : la réduire à la copulation nous conduirait à froidement la valoriser par son potentiel procréateur ou orgasmique... Or, la sexualité c'est plus que ça.

C'est aussi et entre autres : l'intimité, la tendresse, le don de soi (qui peut impliquer la chasteté et la virginité), la liberté, l'attachement, sans oublier l'affection bien sûr... Tout cela, on doit bien le reconnaître, peut être vécu par un couple hétérosexuel aussi bien que par un couple homosexuel. Voilà un terrain commun qui peut être la base d'une discussion, et d'une reconnaissance.

Pour autant, l'homosexuel ne peut pas faire l'expérience de la fonction procréatrice de la sexualité, et il ne peut pas faire l'expérience de l'altérité comme différence sexuelle (qui implique une intelligence, une sensibilité, une affectivité, une esthétique différentes). Il ne s'agit pas de discrimination, mais de distinction : le couple homosexuel n'est pas semblable au couple hétérosexuel, et il y a une différence entre reconnaître la valeur humaine d'un lien affectif entre personnes du même sexe et lui accorder la même reconnaissance symbolique qu'au couple homme-femme.

L'amour humain, c'est l'amour de l'esprit et du corps – c'est l'amour de la combinaison des deux. Cela, parce que l'homme est un corps et un esprit, non simplement un esprit dans un corps : il n'y a pas de vie humaine possible sans cette union entre corps et esprit. Autrement dit, la vie humaine, ce n'est ni un corps sans esprit, ni un esprit sans corps. Notre corps fait donc partie de notre être autant que notre esprit. Et c'est pour ça que l'homme n'est pas complet sans la femme, et la femme n'est pas complète sans l'homme : ils sont faits l'un pour l'autre du point de vue du corps, et donc, du point de vue de l'esprit aussi.

Qu'en dit la Bible ?

En réalité, elle s'occupe moins de condamner l'homosexualité que d'exalter le mystère de la sexualité, où l'homme et la femme sont appelés à discerner quelque chose du mystère de Dieu : quand la Bible dit que l'humain est créé à l'image de Dieu elle ajoute immédiatement qu'il l'est d'emblée comme homme et femme. La littérature hébraïque utilise souvent des parallélismes pour exprimer une idée, et ici cela signifie que les deux sont liés : la sexualité a quelque chose à voir avec la relation entre l'homme et Dieu.

Cependant, l'homosexualité, aussi peu évoquée qu'elle soit dans la Bible, l'est toujours de manière négative, et va a l'encontre de la finalité créatrice de la sexualité (qui est tout de même à affirmer, même si la parenté est libre et facultative). En tant que lieu privilégié de l'expérience de Dieu, la sexualité est donc à pratiquer dans l'altérité.

Relativiser le message

Plusieurs passages bibliques traitant "négativement" de l'homosexualité, ne pouvant être niés, sont donc remis en question, ou relativisés.

Par exemple, on prétend que l'apôtre Paul avait des points de vues logiques dans sa culture, mais qui ne sont plus d'actualité. Tenez, son discours sur les esclaves qui doivent rester obéissants à leurs maîtres est à relativiser, alors pourquoi pas son discours sur l'homosexualité ? Mais d'une part l'esclavage est un mauvais mot pour décrire la réalité des serviteurs de l'époque (on pense à l'esclavage des africains par les colonisateurs, ce qui est totalement différent); et d'autre part il se trouve que Paul a également exprimé un avis révolutionnaire sur le sujet dans son épître à Philémon - il faut prendre son discours dans son ensemble.

Mais quand bien même, Paul milite avec cohérence pour que chacun reproduise l'exemple de Christ : que le serviteur obéisse à son maître comme Jésus a obéi à son Père bien qu'étant son égal, et que le maître aime et cherche le bien de son serviteur comme le Père l'a fait pour Jésus; de la même manière il milite pour que l'homme et la femme imitent la relation de Dieu le fils et Dieu le Père dans leur relation, soit une union d'êtres égaux, essentiellement similaires et en même temps fondamentalement différents. D'ailleurs, Paul fonde son argumentation précisément sur le destin humain voulu par Dieu et qu'Adam et Ève ont rejeté.

Sodome et Gomorrhe plus en détails

Le livre de la Genèse, chapitre 19, versets 1 à 29 nous raconte comment les habitants des ces deux villes furent punis par Dieu. Bien que ce texte laisse une forte présomption d'homosexualité de la part des habitants, l'Ancien Testament n'interprète pas le crime de Sodome et Gomorrhe comme étant l'homosexualité, mais l'inhospitalité (Gn.13:13 parle de “la méchanceté des habitants de Sodome”; Ez.16:49 mentionne leur "inhospitalité"). Au regard du passage, le crime indéniable ici est le mépris des étrangers.

Pourtant le passage de Jude 1:7 spécifie clairement que le crime puni est celui de la méchanceté et des relations contre-nature, mais on pourrait dire que c'est une interprétation tardive des événements - c'est dans le Nouveau Testament, assez éloigné des faits et potentiellement de la mentalité particulière à l'Ancien Testament. Pour rester dans ce dernier, on trouve en fait une histoire similaire à celle de Sodome et Gomorrhe dans le livre des Juges, chapitre 19, versets 22 à 25. Le phrasé est presque identique, et il est clair que dans ces circonstances, connaître fait référence à un mal, une infamie, une chose qui déshonore. L'inhospitalité et la méchanceté des gens du coin est manifestement de l'ordre de l'abus sexuel. Encore une fois, le parallélisme entre les deux passages est porteur de sens, et indique la nature du crime de Sodome & Gomorrhe.

Sans oublier les prétendues icônes Gay de l'Ancien Testament...

Il s'agit bien sûr de David et Jonathan. Certes, les mêmes expressions sont employées pour décrire leur amour et celui entre un homme et d'une femme (1Sam.18:1,19:1, 2Sam.1:26), mais c'est avant tout pour souligner la fidélité qui caractérisait leur relation, plutôt que la nature de l'amour. On parle de leur amitié comme d'un mariage politique, Jonathan ayant compris que Dieu avait choisi David comme successeur de son père Saül. En outre, les pulsions de David étaient clairement tournées vers le sexe opposé, comme le montre son comportement envers Bethsabée. 

Qu'il ait eu un amour particulier pour Jonathan ne peut d'ailleurs nous surprendre que hors-contexte. A cette époque les femmes étaient assez peu éduquées et cherchaient avant tout à plaire physiquement (et particulièrement celles qu'on présentait au roi). Les hommes, eux, devaient faire face à des responsabilités qui réclamaient plus d'éducation, et passaient le plus clair de leur temps entre eux (et c'est encore le cas aujourd'hui au Proche et Moyen-Orient), notamment à la guerre. Jonathan, fils de roi, était certainement très éduqué, et les situations périlleuses auxquelles il a fait face avec David ont certainement forgé des liens très intimes entre eux. Mais, tout ça remis en contexte, rien ne porte à croire qu'il y avait plus qu'une forte amitié fraternelle entre eux.

Que penser de cette vision de la sexualité ?

Toujours pour remettre les choses en contexte, faisons un tour d'horizon du Proche-Orient Ancien, où ont vécu tous ces personnages bibliques : chez leurs voisins les hittites, la zoophilie et le travestisme sont légaux. En Ougarit, les dieux eux-mêmes sont zoophiles ! En Égypte, l'inceste est pratiqué jusque dans la famille royale, de même qu'en Mésopotamie certaines formes d'incestes étaient tolérées. Les Ammonites, eux, sacrifiaient carrément leurs enfants à leurs dieux. Partout dans la région, la castration et la prostitution, dans le cadre d'un culte religieux, étaient courantes. A côté de ça, les prescriptions bibliques au sujet de la sexualité sont étonnamment saines et cohérentes.

Cela montre que l'opinion publique ne suffit pas pour garantir une moralité individuelle et publique de qualité. Et si tu crois qu'on ne commettrait plus ce genre d'égarement moral de nos jours, repenches-toi sur les effets de la "libération" sexuelle depuis mai 68...

1 octobre 2012

L'incrédulité personnelle

Comme chaque lundi, tordons le cou aux faux raisonnements qui parasitent notre esprit. Aujourd'hui, nous parlerons de l'incrédulité personnelle.

On se trompe en concluant que quelque chose est faux simplement parce qu'on a du mal à le croire ou à le comprendre. 

Ce faux raisonnement repose sur la supposition que la vérité est toujours simple. Or, il est évident que ce n'est pas le cas. Bien sûr, ceux qui utilisent cet argument sont conscient de l'incohérence de cette position, et ils ne diront pas que la vérité est forcément simple, mais plutôt que parmi plusieurs explications, la plus simple doit être la bonne.

D'un côté, ils n'auraient pas tout-à-fait tort. Dans les cas d'enquêtes, les scénarios les plus évidents sont, la plupart du temps, les bons (autrement dit, on voit par expérience que le premier suspect qui nous vient à l'esprit est très probablement le coupable). De la même manière, c'est un principe de base de la science : quand on doit choisir parmi plusieurs explications possibles, on choisit par défaut la plus simple.

D'un autre côté, ces deux exemples reposent sur autre chose que la simplicité naturelle des choses :

- dans le premier cas, cela montre que les logiques qui poussent au crime ne sont pas des plus complexes (et là il s'agit spécifiquement de la simplicité de pensée de l'être humain, qui est justement en cause dans ce faux raisonnement);

- dans le deuxième cas c'est une démarche méthodologique pour s'assurer de la vérité des éléments de la théorie par leur caractère nécessaire. Par définition, on peut douter de l'implication d'un élément non-nécessaire, mais pas de celle d'un élément nécessaire.

Voici le bon raisonnement : l'explication la plus simple n'est pas forcément la bonne, et si je ne comprends pas quelque chose, ça ne veut pas dire que ce n'est pas vrai, valide, ou que ça n'existe pas. Cependant, par expérience et par méthodologie, on peut privilégier la plus simple a priori.

28 septembre 2012

La vérité sur les pédés

En mai 68, un philosophe allemand devient la figure emblématique du mouvement de libération sexuelle. Ce philosophe, Wilhelm Reich, prétend que tout le malheur du monde depuis l'aube de l'humanité provient d'une frustration sexuelle. N'est-il pas évident qu'un être sexuellement épanoui est nécessairement paisible et même bienveillant ? Toute violence et toute déviance chez l'humain provient donc d'une oppression sexuelle due à une moralité rétrograde. Il prône donc la libération sexuelle totale : que chacun vive sa sexualité sans tabou, librement, dès l'enfance.

Se développe alors en France une certaine bienveillance négligente envers la pédophilie, et qui durera une quinzaine d'années, sous le regard approbateur des médias. Mais au milieu des années 80, la déviance inhérente à la pédophilie transparaît de plus en plus clairement, on assiste à une radicalisation de la sexualité dans les œuvres pédophiles, vers plus de bestialité, voire un caractère carrément morbide. La critique réprouve, et dès les années 90 s'ensuit un retournement total de la situation : c'est la psychose anti-pédophile, une véritable chasse aux sorcières motivée par le traumatisme d'une série de scandales liés à la pédophilie (dont la tristement célèbre affaire Dutroux).

Comment est-on passé d'un extrême à l'autre en si peu de temps ? Et surtout, comment peut-on l'avoir oublié, pour ne se rappeler que d'un mai 68 libérateur ? Mais vous allez voir qu'on a oublié bien plus - ou plutôt, qu'on ne cherche pas à savoir, car on préfère de loin nos idées romantiques du passé à la réalité.

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Le pédé est l'adepte de la pédérastie, pratique de la Rome Antique qui s'apparenterait aujourd'hui à de la pédophilie éducative (comparable à celle des thèses de Reich). Pourtant on appelle "pédé" les homosexuels, et on attribue à l'Empire Romain une morale sexuelle libérée, tolérante envers l'homosexualité, deux aspects que le christianisme se serait employé à réprimer jusqu'à nos jours... Ne confondons pas tout.

Au début de notre ère, la sexualité dans le monde hellénistique était paralysée par les interdits (il fallait faire l'amour dans le noir, jamais nu, et avec peu de caresses), et pourtant largement tolérante envers les hommes au sujet de l'infidélité conjugale car les épouses étaient un bien : elles servaient à tenir la maison, faire des enfants, et arrondir son patrimoine. D'ailleurs les époux avaient des droits sur leurs épouses, mais ce n'était pas réciproque.

Cette vision de la sexualité dans son ensemble, pédérastie comprise, est fondée sur une volonté misogyne de virilité totale – la sexualité de l'homme adulte est active, non passive. Dans les faits, les cas d'homosexualité étaient tout de même nombreux, ce qui dénote une évidente tolérance (et non pas une acceptation) à cet égard. Mais, d'abord, cela ne concerne que les hommes et non les femmes : la condamnation morale était lourde pour l'homosexualité chez ces dames, ou pour toute pratique sexuelle qui abaisserait l'homme par rapport à la femme (le cunnilungus par exemple). 

Ensuite, cela ne concerne pas les hommes adultes : les éphèbes grecs et les mignons romains étaient presque toujours pré-pubères. L'homosexualité adulte entre deux hommes, telle qu'on l'appelle aujourd'hui, était tout autant réprouvée. Enfin, Platon lui-même écrit que la copulation entre mâles ou entre femelles est contre-nature, et il s'inquiète sérieusement de la pédérastie...

Alors, la vérité sur les pédés, c'est que souvent, on ne sait pas de quoi on parle, et qu'on ferait mieux de se renseigner. A bon entendeur...

24 septembre 2012

Tu quoque

"Avant donc que d'écrire, apprenez à penser" - Nicolas Boileau.

Ainsi donc, ce lundi matin, apprenons à éviter le faux raisonnement intitulé "Tu quoque" - littéralement "toi aussi".

Il s'agit d'éviter une critique en la retournant contre l'interlocuteur, ce qui permet de gagner l'avantage dans le débat en passant de la défensive à l'offensive. Autrement dit, la meilleure défense, c'est l'attaque. Mais si c'est efficace d'un point de vue rhétorique, c'est déloyal d'un point de vue logique, parce qu'au final on ne répond pas à la critique. Exemple :

A - Tu dis que t'es chrétien, mais tu donnes pas un rond aux mendiants.
B - C'est pas toi qui va me donner des leçons de charité.

C'est toujours horripilant de se voir reprocher quelque chose par quelqu'un qui n'a aucune leçon à donner en la matière, et on trouve probablement ça naturel de leur retourner leur critique directement dans la face... mais, en réalité, si leur critique est justifiée - si, pour reprendre l'exemple, on ne donne effectivement pas d'argents aux mendiants - alors il faut y répondre honnêtement, c'est-à-dire le reconnaître. Exemple :

A - Tu dis que t'es chrétien, mais tu donnes pas un rond aux mendiants.
B - Oui, c'est vrai. Pourquoi tu penses qu'un chrétien doit forcément donner aux mendiants ?
A - Et la charité chrétienne ?
B - La charité chrétienne, ça veut pas dire donner son fric à qui t'en demande. C'est gérer les ressources que Dieu te donne pour aider les gens, et c'est ce que je fais. Et donner de l'argent aux mendiants que je croise, c'est pas forcément les aider...

En plus d'être une réponse adéquate à la critique formulée, ça permet qu'un conflit démarre par une volonté de résoudre la situation plutôt que par des accusations.

22 septembre 2012

La vérité sur Avatar

J'aime reconnaître quand j'ai tort (si si), d'abord parce que ça me change de d'habitude... (je rigole) Non, en fait, c'est parce que ça veut dire que j'ai appris quelque chose. Qui n'aime pas avoir raison ? Et pourtant, se rendre compte qu'on a tort et changer d'avis (littéralement, "se repentir") est peut-être un des seuls moyens de s'assurer qu'on a réellement découvert la vérité.

Mais bref, je veux parler ici du film de James Cameron : Avatar. Nombre de chrétiens, moi y compris, y ont immédiatement vu une symbolique chrétienne : Jake Sully, un être plus avancé (du point de vue de la civilisation tout du moins), venu du ciel, s'incarne parmi un peuple autochtone, vit leur vie, est choisi par le Dieu de la planète pour combattre le mal et accomplir une prophétie en dominant le grand dragon, finit par se sacrifier pour sauver tout le monde, et à la fin il ressuscite (grâce à l'action du Dieu qui l'a choisi). Est-ce que ça te rappelle quelque chose ?

Mais les principes de l'incarnation, du combat épique contre le grand méchant monstre, le sacrifice, la mort et la résurrection, sont-il exclusivement chrétiens ? La réponse est non. D'autres religions partagent des concepts semblables, d'ailleurs le titre du film, Avatar, fait référence aux incarnations des divinités hindous. On peut également citer:

- le concept de sacrifice personnel dans l'Hindouisme et dans les religions traditionnelles Africaines;
- le concept de renaissance dans le Bouddhisme (même si ce n'est pas exactement la même chose que la résurrection);
- et tandis que dans la tradition occidentale (Biblique) on tue les dragons, c'est dans la mythologie Chinoise qu'on les chevauche, obtenant par là-même des pouvoirs célestes.

Plus important encore : Comment savoir ce que l'auteur a voulu signifier par tel ou tel symbole ?

Avoir tort pour Avatar

La scientifique bienveillante s'appelle Grace Augustine, le prénom du héros commence par un "J", le nom du Dieu planétaire est pratiquement un anagramme de Yahweh (le nom de Dieu dans la Bible), le peuple autochtone s'appelle les Na'vi, ce qui veut dire "Prophètes" en hébreu, les graines de l'arbre sacré se comportent quasiment comme le Saint Esprit biblique... tout ça, est-ce un hasard ? Je ne le croyais pas.

Mais j'oubliais un principe de base pour interpréter quoi que ce soit : chercher ce que l'auteur a voulu dire.

Demandons donc à James Cameron... La couleur des Na'vi fait écho aux divinités Hindous, qui sont souvent représentées en bleu. Ces derniers n'ont d'ailleurs rien à voir avec les prophètes bibliques, ils sont plutôt, selon Cameron, ce qu'on rêverait d'être, et ce qu'on sait être, au fond : des créatures dont le bien-être est liée à celui de notre planète, même si on choisit de l'ignorer. De même, selon Paul Frommer (linguiste chargé de créer la langue du peuple imaginaire en question) confirme que toute similarité avec le mot hébreu pour "prophète" serait une pure coïncidence, d'autres y ont vu un raccourci déguisé de "Navajos", ce qui semble plus probable étant donné l'histoire (et les similarité linguistiques entre le langage des Na'vi et celui es Navajos).

Par ailleurs le film dans son ensemble fait un parallèle avec l'exploitation et le massacre de populations indigènes : de méchants envahisseurs qui massacrent et pulvérisent des civilisations sans aucune pitié pour s'approprier les ressources des populations locales (conquête de l'Amérique, de l'Afrique, et surtout les deux guerres du Golfe qui ont encadré la rédaction du scénario), mais qui se font finalement battre malgré leur supériorité technologique par des ennemis supérieurs en nombre, avec l'avantage du terrain, et des stratégies inattendues (guerre du Vietnam, entre autres).

Alors voilà : contrairement à ce que j'ai premièrement pensé et dit, Avatar n'est pas un film plein de symbolique chrétienne... mea culpa !

17 septembre 2012

La charge de la preuve

Lundi, jour nommé en l'honneur de l'astre lunaire, et pourtant il faut garder les pieds sur terre...

Une grande règle de débat, souvent enfreinte malheureusement, c'est que quand on affirme quelque chose, c'est à nous de prouver que c'est vrai, et non à l'adversaire de prouver que c'est faux (ce qui impliquerait que s'il ne le peut pas, alors on a raison).

Par exemple, si je veux convaincre quelqu'un que Dieu existe, c'est à moi de lui prouver que je dis vrai.

Pourquoi ? Tout simplement parce que le seul moyen d'être sûr que quelque chose est vrai, c'est de prouver que c'est vrai. Ne pas arriver à prouver que c'est faux peut vouloir dire que c'est vrai, mais ça peut aussi vouloir dire qu'on est trop limité pour y arriver, ou qu'une troisième solution est possible.

Un autre exemple, plus complexe : pour prouver que la thèse Créationniste est vrai, il ne suffit pas de prouver qu'il existe des problèmes sans réponse dans la théorie de l’Évolution. Et inversement. Et même, pour prouver que le Créationnisme est faux, il ne suffit pas de prouver que l’Évolutionnisme se tient. Cela, parce que chacune de ces constructions théoriques évolue au fur et à mesure que la recherche avance, et les deux pourraient fusionner en une seule, ou bien laisser la place à une troisième théorie, totalement nouvelle (même si c'est relativement improbable).

14 septembre 2012

La fac de théo, c'est biblique ?

Si les Églises enseignaient correctement les paroissiens, y aurait-il besoin de facultés de théologie ?

Les apôtres n'étaient, pour la plupart, pas des hommes instruits. Jésus leur avait enseigné de manière simple, et le Saint-Esprit leur permettait de transmettre cet enseignement fidèlement. Chaque assemblée chrétienne devrait continuer à en faire autant, et il n'y aurait alors pas besoin de faculté de théologie.

C'est un discours que je rencontre parfois. Je ne vois pas les choses de cette manière, cependant. Et si, comme de nombreux jeunes chrétiens, j'aimerais être plus et mieux enseigné dans la foi à l'église, ce n'est pas pour ça que je fais des études de théologie.

Les apôtres n'étaient peut-être pas des hommes très instruits, mais ils ont tout de même été instruits par Jésus pendant 3 ans - l'équivalent d'une licence. Cela souligne l'importance de mettre un temps à part pour la formation selon la parole de Dieu.

Pour en revenir aux auteurs du Nouveau Testament, Paul et Luc, qui en ont écrit chacun un tiers, étaient des hommes très instruits. Deux autres évangélistes, Marc et Matthieu, ont écrit selon l'enseignement de ces apôtres peu instruits qui justement ne savaient pas écrire. Moïse et Daniel, parmi les grands auteurs de l'Ancien Testament, ont eux aussi été éduqués par des cours royales (celle de Pharaon et de Nabuchodonosor). Il est donc clair que l'instruction joue un rôle central dans la transmission de la doctrine, si ce n'est dans son articulation (pour ce qui est des épîtres de Paul). Une personne plus instruite se rend plus disponible pour ce travail de Dieu.

On peut ajouter à ça le problème de l'éloignement temporel et spatial : 2000 ans, ou plus, nous séparent des écrivains bibliques. Il n'a jamais été nécessaire pour les premiers chrétiens de faire beaucoup d'efforts pour comprendre les écrits originels, mais pour nous, c'est donc nécessaire :

Les langues d'origine. Si pour le message central, les traductions disponibles aujourd'hui sont limpides et s'accordent, une certaine connaissance du Grec et de l’Hébreu bibliques est nécessaire pour éviter les écueils d'interprétation (plusieurs contradictions apparentes dans la Bible sont résolues par une étude linguistique plus approfondie - des problèmes inhérents à toute traduction).

La culture de l'époque. Les langues représentent une culture, et si on ne l'étudie pas, on ne peut pas comprendre ne serait-ce que les expressions idiomatiques, les tournures de phrases, les références...

La culture contemporaine. Il ne suffit pas d'être né dedans pour la comprendre dans toute sa diversité. Notre époque est extrêmement riche en visions du monde de tous horizons. Plus que jamais il est important de les connaître, de les étudier, d'en démêler les fondements, les articulations et les implications, pour comprendre les gens à qui on s'adresse et leur adresser un message pertinent.

L'éthique. Les questions auxquelles nous faisons face aujourd'hui requièrent un autre niveau de compréhension qu'à l'époque. La FIV, l'euthanasie, l'avortement, etc. sont des problèmes techniques plus complexes que la consommation des viandes sacrifiées aux idoles, ou l'immoralité sexuelle.

L'histoire de l’Église. Dans tous ces domaines, il existe 2000 ans, ou plus, de réflexion, de débats, de vies de chrétiens, qui essayent de formuler le message Biblique fidèlement tout en l'adaptant à leur époque - et nous n'aurions rien à apprendre de ça ? Ne doit-on pas être curieux de ce que Dieu a inspiré à nos frères et sœurs du passé, et de la manière dont les chrétiens ont occasionnellement été mal guidés par les hommes ?

Voilà ce qu'il est bon d'étudier lorsqu'on veut être théologien, et ça prend du temps, des ressources documentaires et des enseignants. Grâce à toutes ces choses, on peut servir ses frères et ses sœurs dans l’Église tout comme notre génération en général. Si on combine tout ça, on obtient une faculté de théologie.

Ce n'est pas un institut de théologie, qui lui sert avant tout à former des pasteurs, de manière très pratique. Il s'agit d'une faculté, qui instruit les chrétiens pour qu'ils servent l'église selon les dons que Dieu leur a donnés, qu'ils deviennent enseignants, pasteurs, docteurs, évangélistes, prophètes, ou simplement des chrétiens dont la foi est solidement fondée en Christ. Ce n'est pas le seul moyen, mais c'est un très bon moyen.

10 septembre 2012

Le purisme

D'un lundi à l'autre, on gagne, on perd : c'est la vie ! Autant perdre des choses sans valeur, et en gagner qui nous enrichissent. C'est pourquoi aujourd'hui je te propose de perdre un faux raisonnement : le purisme.

Ce faux raisonnement fait prétexter qu'une idée ou une pratique est impure afin de rejeter une critique pertinente ou dissimuler une faiblesse dans l'argumentation.

L'expression caractéristique de ce faux raisonnement, c'est "pas un vrai" :

A - Les chrétiens sont hypocrites.
B - Mais non, les gens qui sont hypocrites ne sont pas de vrais chrétiens.

On redéfinit le "vrai" et "bon" exemple à partir de l'exception, pour esquiver automatiquement le contre-argument présenté. Autrement dit, si l'exemple est sujet à une quelconque critique, alors ce n'est pas un bon exemple.

Attention, ici il faut se méfier de la méthode (redéfinir pour exclure la critique), mais pas de la fin (arriver à une définition juste). On peut remettre en question la définition des termes, en fait, tout bon débat commence par une définition claire des termes. Le dialogue précédent pourrait donc donner ceci :

A - Les chrétiens sont hypocrites.
B - C'est quoi, un chrétien ?
A - Ben, c'est quelqu'un qui croit en Dieu, et tout.
B - Et quelqu'un qui croit en Dieu - le même Dieu qui a donné les 10 commandements, et qui jugera la terre entière - quelqu'un qui croit en ce Dieu, serait hypocrite sans problème ?
A - Ben, non. Mais c'est incohérent, c'est ça que je veux dire.
B - Ah, ok. Je suis d'accord avec toi. Ils sont incohérents. En même temps, tout le monde est incohérent : mes parents, nos profs, nos collègues, ça m'arrive de l'être, et toi aussi. C'est un effet de ce qu'on appelle le péché, dans la Bible. Être chrétien ne rend pas instantanément cohérent, mais ça implique de reconnaître et de lutter tous les jours contre notre tendance naturelle à l'incohérence. Et pour ça on a besoin de quelqu'un qui ne l'est pas. Ce quelqu'un, c'est Jésus, et c'est pour ça que je suis chrétien.