17 mai 2013

La mort pour tous

Comment réagir face à la mort des personnes vulnérables dans notre société ? Celle d'un nouveau-né non-viable, un enfant atteint de cancer, une personne âgée délaissée, une femme battue, un ado qui s'est tranché les veines, un SDF... ?

En vrai évolutionniste, ne faut-il pas se dire : "Réjouissons-nous ! Le moins adapté est mort, et nous, les plus adaptés, nous restons. La mort permet et garantit notre adaptation et donc notre survie. Amen." ?
Les pleurs ne sont que sensiblerie et faiblesse morale devant la logique implacable de la sélection naturelle - car on peut en amoindrir les effets qui nous semblent désagréables mais au final il faut reconnaître que le mécanisme est magnifiquement efficace. Après tout, c'est ce qui a fait l'humain tel qu'il est.

En vrai chrétien, il faut pleurer avec ceux qui pleurent. Et avec raison ! La maladie et la mort sont scandaleuses et absurdes, l'être humain n'est pas censé disparaître de manière aussi misérable. Pourtant, en vrai chrétien, on sait que la vie n'a pas dit son dernier mot, car ce monde où tout périt est lui aussi périssable... Un temps viendra où Dieu, qui a créé toute chose, renouvellera toute chose. Alors l'humain, créé à l'origine pour vivre, ressuscitera et vivra; et le monde, créé pour que l'humain en prenne soin, s'épanouira. Alors la mort ne sera plus. On peut pleurer, mais on ne désespère pas, parce qu'on sait que malgré notre condition déchue et méritée, une vie éternelle attend ceux qui ont foi dans les promesses et la bonté de leur Créateur.

5 mai 2013

Disciple de Jésus ?

"Monseigneur, je suis Chrétien, et sincèrement Chrétien, selon la doctrine de l'Évangile.
Je suis Chrétien, non comme un disciple des prêtres, mais comme un disciple de Jésus-Christ."

Quel protestant ne dirait pas amen à cela ? On nous rebat les oreilles, dans nos églises, de la nécessité d'être disciple de Jésus, au point qu'on préfère dire ça plutôt que "chrétien" quand on se présente sur Facebook : cela suscite moins de préjugés. Mais voyons la suite de la citation :

"Mon Maître a peu subtilisé sur le dogme, et beaucoup insisté sur les devoirs ; il prescrivait moins d'articles de foi que de bonnes oeuvres ; il n'ordonnait de croire que ce qui était nécessaire pour être bon ; quand il résumait la Loi et les Prophètes, c'était bien plus dans des actes de vertu que dans des formules de croyance, (Mt.7:12) et il m'a dit par lui-même et par ses Apôtres, que celui qui aime son frère a accompli la Loi. (Gal.5:14)."

Tout à coup se dessinent clairement des motifs humanistes dans le discours, et on sait qu'on a à faire à un libéral, quelqu'un qui met au centre de ses préoccupations l'humain plutôt que Dieu. En l'occurrence, il s'agit ici de Jean-Jacque Rousseau.

Ventrebleu ! Qu'un libéral se prétende chrétien ne devrait pas nous choquer - après tout même les Mormons se prétendent chrétiens, or leur doctrine est carrément hérétique. Mais qu'il se prétende disciple de Jésus-Christ, voilà ce qui est étrange. Les protestants évangéliques, ceux qui se réclament d'une foi véritable et visible en Jésus par les Ecritures et le Saint-Esprit, n'ont-ils donc pas le monopole ? Pas plus que de l'adjectif "évangélique", apparemment...

Mais allons plus loin, et posons-nous seulement la question : sommes-nous appelés à être disciples de Jésus ? La question peut sembler choquante, et la réponse facile, mais regardons - en bons protestants - le texte. Où trouve-t-on le terme disciple dans le Nouveau Testament ? Presque exclusivement dans les évangiles, et, en tous cas, jamais dans les épîtres de Paul, Pierre, Jean, et les autres. La vie de l'Eglise primitive n'est pas du tout centrée sur le terme de disciple.

Pourquoi ? D'une part, parce qu'il y a une différence fondamentale entre les disciples de Jésus dans les évangiles et nous, la même différence qu'il y a entre Pierre dans les évangiles et Pierre dans les Actes : la communion à Jésus par le Saint Esprit. Il faut donc arrêter de nous identifier sans cesse aux disciples des évangiles : si les discours de Jésus s'adressent à eux comme à nous, nous ne sommes pas tout-à-fait comme eux.

D'autre part, parce qu'être disciple c'est un choix personnel, individuel. Les mouvements de Réveils dont nous sommes les héritiers se sont appropriés l'individualisme galopant de la modernité pour le canaliser vers Dieu mais ont difficilement su nous transmettre la dimension collective de l'Eglise des premiers disciples de Jésus-Christ.

Cependant, si le mot disciple n'apparaît pas, la notion est pourtant là, puisque les lettres aux églises sont remplies de commandements (or un disciple, c'est celui qui se discipline en apprenant à obéir), mais la formule qui revient le plus dans ces commandements, c'est "les uns ... les autres" (37 occurrences), dans les épîtres de Paul.

Membres d'un même corps. Nous sommes appelés à obéir, et cette obéissance concerne l'apprentissage d'une vie ensemble. Et si comme le relève Sartre, "l'enfer c'est les autres", vivre en communauté selon ces commandements d'humilité et d'amour nécessite est une véritable mort de notre ego, un sacrifice constant. Mais c'est un exercice collectif, et si nos frères et soeurs en Christ sont souvent pour nous une occasion de chute, ils sont aussi un encouragement sans lequel nous ne pouvons pas être disciples. Une personne seule peut très difficilement être disciple de Jésus.

Autrement dit, la famille (en Christ), on ne peut pas vivre avec, on ne peut pas vivre sans... Alors plutôt que d'être un disciple, sois un des disciples, un disciple parmi d'autre, membre d'un groupe d'étude biblique, de prière, de louange, de partage, d'une assemblée, d'une communauté repentante, ou autre. Appelle-toi "membre du corps de Christ", qui obéit, comme tous les membres, à la tête, qu'est Christ.