28 mai 2012

Corrélation n'est pas cause

Le faux raisonnement, ici, c'est présumer qu'une relation entre deux choses est nécessairement une relation de cause à effet.

On confond souvent corrélation (deux choses qui arrivent ensemble ou à la suite l'une de l'autre) et cause (une chose qui en provoque une autre).  Ainsi la corrélation englobe plus de chose que la cause, il ne faut pas généraliser.

D'une part, le cas échéant, il est parfois difficile de savoir laquelle des deux choses cause l'autre. D'autre part, voici trois alternatives possibles :

- Coïncidence. La relation peut ne pas être réelle, mais simplement perçue, auquel cas c'est une simple coïncidence.

Depuis que j'ai mis un mouchoir anti-girafe dans ma cuisine, je n'y ai vu aucune girafe.  

- 3e facteur. Les deux choses considérées peuvent être provoquées par une 3e chose, pas encore considérée.

Souvent, quand je m'endors tout habillé, je me réveille avec une gueule de bois.


- Cercle vicieux. Les deux choses peuvent se provoquer l'une-l'autre, c'est le principe d'un système autorenforçant.

Les gens obèses ont tendance à beaucoup manger. Il faut croire que l'obésité donne faim.

25 mai 2012

Le christianisme est-il une secte ?

Quand je me suis converti au christianisme, mes proches ont eu peur que je ne sois tombé dans une secte. Pourquoi ? Parce que quelqu'un comme moi ne pouvait tout simplement pas être assez bête pour devenir religieux. Or on sait que si la religion est l'opium du peuple, la béquille mentale des faibles d'esprit, les sectes quant à elles peuvent embrigader même des gens d'intelligence normale.

Mais depuis ce temps, je suis toujours chrétien, et si l'avis de mes proches a changé au sujet du christianisme, c'est plutôt en bien qu'en mal il me semble. Mais eux ne sont pas des faibles d'esprits, alors comment peuvent-ils sympathiser ? Le christianisme serait-il une secte dans laquelle je les embrigaderais inconsciemment ? Mais prenons les questions dans l'ordre...

Qu'est-ce qu'une secte ?

Question aussi fondamentale que polémique, la définition de la secte fluctue. Aussi je me contenterai de relever cinq points : trois caractéristiques structurelles, et deux caractéristiques doctrinales, sachant que pour chacune, c'est la multiplication des facteurs qui dénotera une réelle dérive sectaire.


1. Une aliénation progressive de l'individu, généralement facilitée par l'isolation de la société et de la famille, l'appropriation des biens des membres, l'endoctrinement (renforcement des croyances et normes de la secte avec représentation caricaturale des visions divergentes), l'affaiblissement physique et mental des membres (sous couvert de pratiques ascétiques de purification par exemple), la manipulation émotionnelle et psychologique (de manière imperceptible d'abord, puis par la coercition explicite), ou la reconstruction cognitive insidieuse (“lavage de cerveau”).


2. Une opposition extrême au reste du monde, par un enseignement salvateur qui se veut nouveau et unique, dont la secte est la source exclusive, et dont on ne peut bénéficier qu'en vivant en son sein, en rupture avec le reste du monde, souvent est représenté comme persécuteur.

3. Un ou des dirigeants très charismatiques, aux affirmations invérifiables ou non vérifiées, et qui se substituent à une figure d'autorité salutaire pour les membres (père, enseignant, guérisseur, etc.).

4. Le salut par les œuvres. C'est de là que découlent les caractéristiques structurelles des sectes : il faut faire quelque chose pour accéder à une vie meilleure (dans ce monde-ci ou un hypothétique "après").

5. Le témoignage intérieur. Les sectes cherchent à susciter une expérience personnelle agréable à l'individu, et la mettent en avant comme témoignage intérieur de la vérité du système. Autrement dit, on convaincra de la doctrine par l'expérience personnelle et on répondra aux incohérences et aux contradictions doctrinales de la secte par un appel à l'humilité devant cette vérité supérieure, qui elle est confirmée par le ressenti (parfois mystique).

Pourquoi les sectes sont-elles dangereuses ?

La secte détruit :

- La personne (violence et aliénation psychologique),
- La famille (séparation radicale du milieu d'origine),
- La société (rupture d'avec la vie sociale et atteinte à la famille).

Mais tant qu'elle n'enfreint pas de loi ou ne porte pas atteinte à la santé ou l'ordre public, il est difficilement justifiable pour un gouvernement d'intervenir. D'ailleurs à l'inverse, les mouvements radicaux ou dissidents ne sont pas nécessairement des sectes.

Que dire du christianisme ?

Si on reprend les 5 premiers points, il est clair que plusieurs mouvements qui se réclament du christianisme manifestent des dérives sectaires (Témoins de Jéhovah, Mormons, Moon, certains ordres Catholiques, certaines églises protestantes, etc.). Cependant on pourra remarquer que tous ces mouvements ajoutent au fondement du christianisme (à savoir, la Bible) ou le modifient.

En effet, le message de Jésus selon la Bible est un message de libération, ou comme j'aime le paraphraser : un retour vers la vie, la vraie. Autrement dit, pas d'aliénation, pas de coercition. Bien qu'en opposition au monde, Jésus invite ses disciples à ne pas vivre en rupture, en groupe élitiste : son royaume n'est pas de ce monde, mais il est dans ce monde.
Son dirigeant, Jésus-Christ démontrait ses affirmations par des miracles, et non pas des miracles de prestidigitateur (comme ce gourou indien qui fait apparaître des œufs ou de la "cendre sacrée") mais des guérisons, des prodiges physiques, et surtout, sa résurrection. Il propose aux hommes d'être sauvés gratuitement, et il ne promet pas la paix dans la vie, mais la paix dans les souffrances (souffrances qu'il promet également) - pas de doucereuse sensation de guimauve intérieure. Aujourd'hui nous disposons de la Bible, un document enraciné dans l'histoire, témoignage extérieur à notre subjectivité, pour vérifier la vérité du message.

Enfin, le message de Jésus n'a pas détruit la société, la famille ou l'individu, mais il l'a construit. La majorité des avancées sociales sont d'inspiration chrétienne : premiers droits de la femme, création des hôpitaux, des orphelinats, des droits des enfants, premiers soins envers les handicapés mentaux, suppression de la traite des noirs et abolition de l'esclavage, soutien et expansion de l'instruction et de l'éducation...

Alors, le christianisme est-il une secte ? A toi de voir, mais pour ma part, je ne crois pas.

21 mai 2012

L'homme de paille

L'Homme de paille, c'est celui qui symbolise le mal et qu'on brûle en place publique le jour de carnaval, c'est le bouc-émissaire, le moulin à vent que Don Quichotte prend pour un géant et attaque, c'est le portrait de l'opposant politique sur lequel on dessine des crocs et des cornes...

C'est caricaturer un argument pour le réfuter plus facilement.

L'exagération, la caricature, ou même la pure invention d'arguments adverses permet de favoriser son propre argument, par contraste avec celui de l'adversaire.

Ex : Les religions, c'est un tas de belles histoires pour faire marcher droit le peuple pendant que les dirigeants s'en mettent plein les poches. Mais moi, je crois en la liberté individuelle, la liberté de conscience, et je ne tolère pas ces systèmes d'aliénation de masse.

Ce serait gravement méconnaître "la religion" que de dire que c'est "un tas de belles histoires" par nature, même s'il est clair qu'elle a été récupérée et utilisée à de mauvaises fins. Et puis, ne pas tolérer la religion en s'appuyant sur la liberté de conscience, c'est totalement incohérent.


18 mai 2012

Mes faux raisonnements

Inspiré par ce site web qui répertorie les 24 erreurs de logique à ne pas commettre pour avoir un raisonnement fiable, je te proposerai chaque lundi de nous pencher sur l'une d'entre elles. Le but, c'est qu'à la fin on ait appris à respecter les bases d'un débat rationnel et constructif. Et ça me servira autant qu'à toi !

Bien sûr, l'humain n'est pas que rationnel, et la connaissance de notre monde ne dépend pas que de la raison. Néanmoins cet outil parmi d'autres est à aiguiser pour l'utiliser efficacement - tout comme on devrait rester maître de ses émotions (c'est-à-dire choisir quand les laisser aller et non les laisser aller tout le temps), on devrait rester maître de sa raison.

Mais avant tout, il faut connaître la première étape de la pensée logique : les 3 types de raisonnements de base que l'on peut construire.

1, 2, 3, je ne me tromperai pas

Il existe trois types de raisonnements : la déduction, l'induction, et l'abduction. Ils reposent sur la mise en relation de deux phrases (prémisses) afin de conduire soit à une conclusion (pour la déduction) soit à une hypothèse (pour l'induction et l'abduction). Pour clarifier, voici un exemple :

Déduction

Tous les haricots dans le sac sont blancs.
Ces haricots viennent du sac.
Ces haricots sont blancs.

Induction (généralisation)

Ces haricots sont blancs.
Ces haricots viennent du sac.
Tous les haricots dans le sac sont blancs.

Abduction (liaison)

Tous les haricots dans le sac sont blancs
Ces haricots sont blancs
Ces haricots viennent tu sac.

Et on fait quoi de tout ça ?

Le but, c'est de différencier les raisonnements pour savoir lesquels mènent à une conclusion nécessaire, et lesquelles mènent à une conclusion possible.

Pour ça, il faut repérer les 3 types de propositions possibles, et les agencer dans le bon ordre. Il y a le cas général (Tous les haricots dans le sac sont blancs), le lien (Ces haricots viennent du sac) et le cas particulier (Ces haricots sont blancs). Dans cet ordre, du cas général vers le cas particulier, c'est une déduction logique, conclusion nécessaire. Si on généralise à partir du cas particulier, c'est une induction. Enfin, si avec les deux cas on cherche à faire la liaison, c'est une abduction.

Lundi prochain : l'Homme de paille.

4 mai 2012

J'ai la vérité, et toi ?

Pilate entre dans le prétoire et appelle Jésus.

Pilate - Es-tu le roi des Juifs ?
Jésus - Est-ce de toi-même que tu dis cela, ou d’autres te l’ont-ils dit de moi ?
Pilate - Moi, suis-je Juif ? Ta nation et les principaux sacrificateurs t’ont livré à moi : qu’as-tu fait ?
Jésus - Mon royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour moi afin que je ne sois pas livré aux Juifs ; mais maintenant mon royaume n’est pas d’ici-bas.
Pilate - Tu es donc roi ?
Jésus - Tu le dis, je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix.
Pilate - Qu’est-ce que la vérité ?

Pilate sort du prétoire.

- Évangile de Jean, chapitre 18, verset 33-38.
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Les choses semblent en être au même point depuis plus de deux mille ans. Combien de gens refusent d'entendre le message de Jésus en objectant que la vérité est un concept flou ou intangible, et qui reprochent leur arrogance aux chrétiens qui prétendent "avoir la vérité" ? Mais de quoi parle-t-on exactement ?

Globalement, il y a deux manières de la concevoir :

- La première est dite réaliste : la vérité, c'est ce qui est conforme au réel.
- La seconde est existentialiste : la vérité c'est ce qui est conforme à notre expérience du réel.

La distinction se faisant ici : peut-on, ou non, connaître le réel, et dans quelle mesure ?.

Pour éviter de tomber dans un débat philosophique presque intemporel, je te propose d'adopter un autre angle d'approche. Au sens biblique, la vérité, c'est ce qui correspond à tous les sens modernes du mot "sûreté" : quelque chose de fiable, sur lequel on peut s'appuyer, et c'est aussi une certaine norme de la parole et de la pensée.

Ainsi, la question devient : qu'est-ce qui est sûr ? qu'est-ce qui est normatif ?

Jésus prétend ici que son royaume est sûr et normatif. Il dit être un roi digne de confiance, témoin d'une réalité normative - la vie telle qu'elle devrait être, ou "la vie, la vraie", comme je dis souvent - et il invite tous ceux qui recherchent cette vraie vie à devenir les citoyens de son royaume. On ne l'établira pas ici et maintenant - ce royaume idéal n'est pas de ce monde - mais on peut d'ors et déjà se comporter selon ses lois, parce qu'elles sont bonnes, et pour témoigner de cet autre monde à venir. Tout cela, en faisant des concessions bien sûr, parce que nous sommes imparfaits et ce monde aussi. C'est ça, "avoir la vérité", pour un chrétien.

Et toi, de quelle vérité témoigne ta vie ?