30 juillet 2012

L'argument d'autorité

Vidons-nous la tête - mais seulement de ce qui est futile ! Quel meilleur moment qu'en début de semaine pour faire le ménage dans nos raisonnements ?

Aujourd'hui, nous verrons qu'encore trop souvent, nous utilisons, au lieu d'un argument, l'opinion d'une personne qui fait figure d'autorité.

Bien sûr, les experts sont souvent mieux informés et ont, normalement, une meilleure compréhension des choses, mais en soit, ça ne veut absolument pas dire qu'ils ont raison (d'ailleurs, à expert, expert ennemi : on peut citer un autre expert qui a un avis différent).

Alors il faut se méfier de qui on cite, et de ce qu'on cite. Puisqu'il est plus simple de raisonner en clichés, on cite à tort et à travers, attribuant sans raison une autorité suprême à des gens qui ne la méritent pas, ou en tirant leurs citations hors de son contexte général.

Typiquement : Einstein. Sa (fausse) citation sur les abeilles, ou sa croyance en Dieu (mais lequel ?), sont de bons exemples.

En d'autres termes : vérifions nos sources ! En particulier, ne nous contentons pas d'une simple recherche sur Google. D'ailleurs, comme le disait Abraham Lincoln : "Le problème avec les citations sur Internet, c'est qu'elles sont rarement authentiques".

23 juillet 2012

L'argument circulaire... faut-il en avoir peur ?

La semaine recommence, et c'est le moment de vérifier qu'on réfléchit correctement : vidons nos greniers cérébraux de ces faux raisonnements qui y trainent depuis trop longtemps !

Aujourd'hui, c'est particulier. La charte de la logique indique que les raisonnements circulaires sont à bannir de nos réflexions. Mais le peut-on vraiment ?

Un raisonnement circulaire, c'est un raisonnement qui contient sa conclusion dans son énoncé de base. Par exemple : Je ne mens jamais, et la preuve, c'est que je le dis. Dans l'énoncé "Je ne mens jamais...", on présuppose déjà qu'on dit la vérité. Plus explicitement exprimé, cela donne : Si je suis honnête, alors je suis honnête. Aucun intérêt, et surtout, ça ne convainc personne.

Seulement... on commence tous par là. Tout système de croyance, de réflexion, de raisonnement, est fondé sur un raisonnement circulaire, un postulat. On ne s'en rend généralement pas compte parce qu'on ne creuse pas si loin, mais on serait bien en mal de justifier entièrement tout ce qu'on croit en remontant jusqu'à l'origine.

Et si vous n'êtes pas d'accord, prouvez-moi par A+B que vous avez un libre arbitre. Ou que vous existez, tout simplement.

Alors, disons qu'il faut se méfier des raisonnements circulaires. Il faut les évaluer avec deux questions :

1. Sont-ils cohérents en interne ? Autrement dit, contiennent-ils ou non des contradictions logiques ?
2. Sont-ils cohérents en externe ? Autrement dit, correspondent-ils à la réalité ?

Et au cas où ils ne seraient apparemment pas cohérents avec la réalité, il faut aller plus loin et se demander s'ils expliquent leurs incohérences avec la réalité. Par exemple, beaucoup de gens rejettent le christianisme à cause du mauvais exemple des chrétiens. Autrement dit, le christianisme serait faux puisque les chrétiens ne correspondent pas, dans la réalité, à l'exemple de Jésus.

C'est compréhensible, mais c'est un raisonnement invalide, puisque selon Jésus-Christ, l'homme aime profondément le mal et le fait de devenir chrétien ne le libère pas instantanément et complètement de cette perversion - d'où sa tendance, même une fois converti, à se comporter mal. Ainsi l'enseignement de Jésus correspond à la réalité : les chrétiens ne sont pas meilleurs que les autres, mais ils doivent le reconnaître et se pardonner leurs fautes les uns aux autres.

Allez, bon lundi !


20 juillet 2012

Pour une pensée logique, mais pas trop

Il y a trois éléments à considérer quand on réfléchit :

1. Notre manière de penser.
2. Sur quoi repose notre manière de penser.
3. Sur quoi repose notre point de départ.

Ces éléments font appel à trois principes : la logique, l'autorité, et la vérité.

Prenons l'exemple du raisonnement logique le plus connu, exprimé de la manière la plus brute :

Tous les hommes sont mortels.
Socrate est un homme.
Socrate est mortel.

Ce qu'on lit généralement, c'est :

Tous les hommes sont mortels,
Or Socrate est un homme, 
Donc Socrate est mortel.

Mais c'est aller trop vite. Car si tous les hommes ne sont pas mortels, alors on ne peut plus en déduire que Socrate est forcément mortel. Autrement dit, si la première proposition est fausse, ou la deuxième d'ailleurs, le raisonnement reste valide en théorie, mais il n'est plus bon. On devrait donc lire :

Si tous les hommes sont mortels
Et que Socrate est un homme,
Alors Socrate est mortel.

Est-ce que je ne suis pas en train de couper les cheveux en quatre ? Et où est-ce que je veux en venir avec tout ça ? Tout simplement à ce que j'ai dit au début : au-delà du principe de logique (la manière  de penser, la forme du raisonnement), il faut s'intéresser aux principes d'autorité et de vérité pour prétendre suivre un bon raisonnement.

La vérité : c'est ce qui fonde tout bon raisonnement. Il ne suffit pas de vouloir penser de manière logique, parce que la logique ne se justifie pas elle-même. La logique est un moyen parmi d'autres pour arriver à la connaissance, et pour la communiquer. Mais elle n'est que ça, un moyen, un outil, une machine sans âme ni humeur, qui ne produit ce qu'on attend d'elle que si on y injecte ce dont elle a besoin. Et elle a besoin de vérité pour donner de la vérité. Mais où trouver ce carburant nécessaire à la machine logique ?

L'autorité : c'est la source de vérité. Ce qu'elle dit fait autorité - ce n'est pas le fait que nous croyons que c'est une source de vérité qui fait autorité, mais nous croyons tous que ce que nous reconnaissons comme source de vérité fait autorité (la nuance est importante). Que l'on soit d'accord avec ou non (et il ne s'agit pas de goûts personnels ou de préférences), nous sommes contraints de nous y soumettre. Que chacun évalue la sienne, mais que l'on ne s'y trompe pas : la logique, la raison, la science, etc., sont des outils, et non des sources ! Ils ne peuvent pas faire autorité, ils ne font que confirmer ou infirmer l'autorité d'une supposée vérité.

Ainsi la question à se poser quand on prétend raisonner de manière logique, ce n'est pas seulement de savoir si son raisonnement est valide, mais s'il est vrai, et d'où vient cette vérité.

16 juillet 2012

Répandu égal vrai

Lundi, le jour où on sort les poubelles de notre esprit, pleines de faux raisonnements dont on doit se débarrasser !

Aujourd'hui, nous verrons que la popularité d'une idée n'a aucune incidence sur sa validité. Ou comme le disait Coluche : "C'est pas parce qu'ils sont nombreux à avoir tort que ça leur donne raison".

Le fait qu'un grand nombre de gens s'accordent à penser qu'une chose est vraie ne rend pas cette chose vraie. C'est probablement une donnée à prendre en compte, après tout on évite souvent des erreurs de logique en confrontant ses raisonnements à ceux des autres, et l'union peut donc faire la force.

Mais, en soi, même si 300 000 américains, motivés par les media, disaient que la France est en guerre civile, la France ne serait pas pour autant en guerre civile. Autrement dit, l'argument du nombre n'est pas absolu, loin de là - or en matière de logique, il faut savoir faire la différence entre un argument valide, absolu, contraignant, et un argument relatif.

13 juillet 2012

Jésus guimauve et bizounours

Jésus n'est pas venu seulement annoncer l'amour éternel de Dieu pour l'humanité. Jésus est envoyé à un peuple de rebelles incapables d'aimer, pour les appeler à la repentance. Et il prévient clairement qu'en cas de refus, le jugement de Dieu suivra.

Trop souvent on veut réécrire l'histoire, faire de Jésus un sage mystique, un baba-cool antique, ou un humaniste éclairé, mais la vérité c'est que Jésus ne nous laisse pas ces possibilités. Un sage mystique n'aurait pas volontairement provoqué les autorités juives et romaines pour être crucifié, un baba-cool n'aurait pas autant parlé de l'Enfer, un humaniste n'aurait pas tant insisté sur l'incapacité de l'homme à s'améliorer par lui-même, et son besoin de Dieu.

On ne peut penser ça que si on n'a jamais lu aucune page de la Bible, et si on l'a lue, alors on est obligé de conclure que soit Jésus était fou, soit il était ce qu'il prétendait être : Dieu.

Car dans l'histoire de l'humanité, il y a 4 types de personnages marquants : les fous qui se prenaient pour des hommes, les fous qui se prenaient pour des dieux, les sages qui se prenaient pour des hommes, et le sage qui se prenait pour Dieu. La dernière catégorie est au singulier parce qu'il n'y a que Jésus qui l'ait fait. Mais bref, étant donné que Jésus se prenait pour Dieu, soit il était fou, et donc pas Dieu, soit il était sage, et donc Dieu.

Or peu de gens dans l'Histoire ont imaginé que Jésus pourrait avoir été un simple illuminé, un dérangé qui aurait par mégarde fait une telle impression sur les hommes qu'il aurait renouvelé à lui seul une religion aussi vieille que le judaïsme et qui perdure encore deux mille ans plus tard. Et effectivement, c'est très peu probable.

La réalité, c'est que Jésus n'est pas dérangé, mais il dérange. Et c'est pour ça qu'on veut réécrire l'histoire sans la connaître - on veut le cataloguer pour se rassurer. On n'a surement pas envie d'entendre que, peut-être, on se trompe. On craint son discours révélateur, qui jette une lumière peu flatteuse sur la nature humaine - sur nous, sur toi. Croire qu'il est qui il prétendait être, et qu'il peut nous sauver de notre condition humaine demande un grand sacrifice pour notre égo.

Et pour accepter de prendre ce risque, il faut être désespéré par ce monde et par soi-même. Mais heureusement, nous n'en sommes pas tous là. Et puis si on déprime un peu parfois, il suffit de regarder des séries exaltantes à la télévision, ou de se plonger dans le boulot, ou les relations amoureuses - ça occupe l'esprit et ça évite de trop réfléchir.

9 juillet 2012

Noir et blanc

C'est de nouveau lundi, et voici le faux raisonnement à bannir de sa pensée cette semaine : le raisonnement en noir et blanc.

Il s'agit de ne présenter que deux alternatives possibles dans une situation donnée, alors qu'il en existe d'autres. Souvent ces deux alternatives sont diamétralement opposées, l'une repoussante et inacceptable à souhait, l'autre difficile à accepter mais moins coûteuse moralement. Le but est bien sûr de caricaturer les options et de manipuler le cadre afin de faire accepter à l'adversaire un argument.

On veut souvent me convaincre qu'il peut être bon de mentir, et voici un exemple de faux raisonnement qu'on me propose pour se justifier :

"C'est pendant la 2e guerre mondiale, tu caches des juifs chez toi, les SS frappent à ta porte. Tu ouvres, on te demande si tu caches des juifs, et si tu dis oui, ils vont les tuer. Qu'est-ce que tu fais ?"

C'est une situation extrême, qui, avouons-le, a très peu de chance de se réaliser. C'est important à noter parce que les gens utilisent souvent ce genre d'exemples extravagants pour justifier toutes sortes de situations courantes. Ensuite, il faut noter que celui qui énonce la situation se prend pour Dieu : il a déjà décidé ce qui se passerait si on disait oui. Or il est tout aussi important de reconnaître que, si on peut se douter de ce qui va se passer, en réalité, on n'en sait rien.

Par exemple, pour transposer dans ce cadre une histoire vraie, ajoutons que vous êtes quelqu'un d'important. Vous dites oui, mais vous refusez de les livrer. Les SS hésitent : ils ont pour ordre d'emmener les juifs, mais ils ne savent pas s'ils peuvent utiliser la force contre des notables. Voyant la faille, vous protestez avec force, les voisins commencent à regarder ce qui se passe. Dans le doute, les SS se retirent.

Voici une alternative possible, puisqu'elle est réellement arrivée (ailleurs et dans d'autres circonstances, certes). Peu probable ? Peut-être. Mais cela montre qu'on ne maîtrise pas toutes les variables d'une situation. Ce genre de raisonnement où l'énonciateur limite les possibilités n'est en fait qu'une manière de vous forcer la main malhonnêtement pour se donner raison. D'ailleurs, en utilisant le même raisonnement, on pourrait justifier le viol, le génocide, et toutes sortes d'horreurs.

6 juillet 2012

Le Boson de Higgs : avant d'en parler...

Les ignorants parlent aux ignorants.

Il n'y a qu'une demi-poignée de gens parmi tous ceux que je connais qui seraient probablement à même de m'expliquer, même simplement, ce qu'est le Boson de Higgs, et quelles sont les implications de la découverte récente du CERN. Autrement dit, c'est une nouvelle peu accessible, et encore assez obscure.

Et pourtant, les journalistes nous en rebattent les oreilles, et les publics de tous poils s'empressent de donner leur avis sur cette découverte qu'ils ne comprennent réellement ni les uns ni les autres. Et voici l'homme moderne moyen qui nous dit qu'on maîtrise enfin la théorie du Big Bang, donc plus besoin des religions; et voilà le post-moderne moyen qui lui rétorque que même si Dieu n'existe pas, c'est peut-être mieux de ne pas le savoir...

La légèreté dont on fait preuve dans nos discussions, tant les uns que les autres, révèle bien une angoisse profonde qui nous pousse à vouloir donner notre avis, exprimer nos espoirs, se justifier, défendre un point de vue, avoir raison.

Encore récemment je discutais avec deux amis, on se demandait s'il était bon de dire les vérités qui dérangent à ses amis, quitte à se brouiller avec eux. Et bien que nous soyons partis d'une discussion générale et relativement objective, nous avions tous en tête une situation précise de notre vie passée ou présente qui nous poussait à argumenter dans un sens ou dans l'autre. Et chacun cherchait à se justifier en prenant comme exemple cette situation qu'il avait à l'esprit.  L'exemple type d'un dialogue de sourd, même si ça n'en avait pas forcément l'air.

Je me suis rendu compte de ça vers la fin de la discussion. Je n'ai rien dit (j'aurais dû), mais intérieurement, je me suis décidé à agir : il y avait un ami avec qui il fallait que j'aborde un point délicat, quitte à me brouiller avec lui. Si j'avais passé presque une heure à argumenter devant mes amis que "dire la vérité qui dérange" à un ami n'était pas si simple, c'est en fait parce que j'avais peur de le faire.

Voilà pourquoi, il y a un mois à peu près, quelqu'un que je venais de rencontrer me déclarait qu'il ne voulait pas parler de religion, parce que ça ne servait à rien : son expérience lui avait "prouvé" que les gens ne font que se renforcer dans leurs convictions, à moins d'un traumatisme les oblige à changer complètement de système de pensée. Était-il convaincu, pour commencer, que les discussions ne mènent jamais nulle part, ou était-ce un mécanisme de défense face à un étudiant en théologie tel que moi ? Peu importe, au final.

J'étais à ce moment-là moins angoissé, et j'ai pu creuser sereinement la question avec lui, si bien qu'au bout de deux heures, nous nous sommes quittés d'accord sur le fait que la discussion est utile et même profitable, et qu'on peut changer d'avis plus ou moins perceptiblement, à condition d'avoir une discussion saine.

Tout ça pour dire que la communication la plus simple nécessite un apprentissage - bien sûr méthodique, mais avant tout personnel et identitaire. Tant que l'on agira par angoisse, on ne fera rien d'autre que de combattre ses propres démons, et on ne tombera d'accord qu'avec ceux qui sont prisonniers des mêmes luttes.

Des gens comme R. Dawkins et M. Onfray en sont de bons exemples : ils s'emploient à tenter de démontrer que Dieu n'existe (très probablement) pas par des arguments qui n'ont rien à voir avec l'existence de Dieu, tout simplement parce qu'ils cherchent à exorciser leur propre mauvaise expérience de la religion, et leur talent respectif entraine dans leur sillage tout un tas de disciples qui partagent leur angoisse.

C'est d'ailleurs assez ironique, car c'est justement en Dieu qu'on peut se libérer de cette angoisse...

2 juillet 2012

La fausse série statistique

C'est lundi : encore une occasion pour apprendre à se défaire de ses propres erreurs de raisonnement !

Voyons aujourd'hui la fausse série statistique. Il s'agit de croire que des "séries"se produisent dans des événements statistiquement indépendants.

Par exemple, si vous jouez à pile-ou-face, puisque la pièce a 50% de chances de tomber de chaque côté (en admettant qu'elle ne puisse pas retomber sur la tranche), alors si on la lance plusieurs fois en l'air, avec le temps il devrait y avoir un nombre plus ou moins égal de fois où elle retombe d'un côté et de l'autre.

Seulement, il ne faut pas en conclure que si elle est retombe 10 fois du côté pile, la 11e fois, elle aura plus de chances de tomber du côté face. Il y a toujours 50% de chances qu'elle retombe d'un côté ou de l'autre.