31 décembre 2012

Tous mes faux raisonnements (ou presque)

Chaque lundi je te propose de t'alléger l'esprit d'un faux raisonnement, et voilà déjà 8 mois que dure ce régime. Je n'ai plus grand-chose à ajouter à ce sujet, mais attention : un régime équilibré n'a pas pour but d'être temporaire, c'est une habitude à prendre, un idéal à viser chaque jour par la pratique. Autrement dit, il faut y revenir quotidiennement.

Pour t'aider, voici un petit récapitulatif - incomplet malheureusement - de ce chemin parcouru ensemble (l'original en anglais ici). J'espère que ça te donnera envie de l'encadrer dans ton salon, ou de l'afficher sur la porte des toilettes, pour assainir les débats et les rendre plus productifs.



En prime, un petit poster qui pose les bases d'une discussion rationnelle.

28 décembre 2012

15 principes apologétiques selon G. Bahnsen

Greg Bahnsen (1948-1995)était un philosophe calviniste américain, et c'est probablement lui qui aura le plus vulgarisé les écrits de Cornelius Van Til, l'apologète réformé par excellence, en reprenant notamment son travail sur les présupposés, les faux raisonnements, et la démarche apologétique.

1. Défendre la foi chrétienne est une nécessité morale pour chaque croyant, nous devons être "toujours prêts" à rendre compte de notre espérance  (1Pi.3:15).

2. Pour éviter de faire fausse route, voilà ce que ça n'implique pas:

(a) d'être agressif,
(b) d'avoir comme objectif de persuader,
(c) de se fonder sur une autorité autre que la théologie.

3. Pour le chrétien, la raison devrait être un outil, et non l'autorité ultime de sa pensée. 

4. Notre affirmation devant le monde est que le croyant sait que la Bible est vraie - nous pouvons justifier notre acceptation de sa fiabilité par de bonnes raisons.

5. Le conflit entre croyant et non-croyant est ultimement un conflit de visions du monde différentes, c'est-à-dire différents ensembles de présupposés qui guident la réflexion et d'après lesquels toute expérience est interprétée

6. En conséquence, nous devons argumenter "l'impossibilité du contraire", c'est-à-dire montrer que seul le Christianisme contient les préconditions d'intelligibilité de toute expérience humaine et de tout raisonnement humain. Si le Christianisme n'était pas vrai, personne ne pourrait rien prouver, ni rien comprendre.

7. Les non-croyants se trompent eux-mêmes : ils connaissent la vérité au sujet de Dieu, mais ils la répriment en rationalisant les indices clairs présents en eux et tout autour d'eux. 

8. Celui qui se défend intellectuellement et moralement, en réalité, ce n'est donc pas Dieu, mais le non-croyant. 

9. Il y a une large gamme d'attaques du Christianisme, et on ne peut pas correctement y répondre en appuyant sa défense sur : 

(a) le subjectivisme (la connaissance ne relève pas de l'objet mais du sujet qui connaît),
(b) le relativisme (le sens et la valeur des croyances humaines n'ont pas de fondement absolu transcendantal),
(c) l'éclectisme (piocher à droite à gauche ce qui nous semble intéressant dans différentes philosophies).

10. Les apologètes doivent argumenter. Une argumentation qui honore Dieu n'est pas querelleuse, mais guidée par les exemples bibliques.

11. Un argument affirme la vérité d'une proposition en se fondant sur d'autres propositions vraies.

12.Une argumentation rationnelle ne se limite pas à la simple utilisation d'un raisonnement déductif par syllogisme.

13. Dieu souhaite que nous maîtrisions les outils de la rationalité pour défendre la foi chrétienne. C'est notre devoir de réfuter les attaques des non-croyants et de proposer une critique interne de la position philosophique dont l'attaque est issue.

14. Les deux péchés intellectuels que les gens commettent le plus sont : 


(a) l'incohérence,
(b) le jugement arbitraire.

15. Face à un non-croyant, le chrétien devrait être prompt à signaler les erreurs de pensée :  

(a) les conjectures préjudicielles,
(b) les partis pris philosophique non-justifiés,
(c) les présupposés qui sont incohérents entre eux,
(d) les faux raisonnements,
(e) les comportements qui vont à l'encontre des croyances proclamées.

24 décembre 2012

Faux syllogismes

Aussi appelés "sophismes", les faux syllogismes sont des raisonnements qui ne respectent pas les 4 règles de base de la logique déductive. Pour rappel, la déduction consiste toujours à passer de la règle générale à son application particulière de la manière suivante :

1. Si la catégorie A a la propriété B.
2. Et que C appartient à la catégorie A.
3. Alors C a la propriété B.

Voici les 2 sophismes qui sont les plus répandus :

- Désordre (1.3.2). Si la catégorie A a la propriété B, et que C n'a pas la propriété B, alors C n'appartient pas à la catégorie A. Sauf que la catégorie A n'a pas pour seule propriété B.

Ex : Si les mexicains ont tué Kennedy, alors ce sont des lâches. Mais il ne l'ont pas tué, donc ce ne sont pas des lâches.

Là c'est évident, mais si on prend un exemple plus courant, ça donne ça : Les gens religieux croient à des superstitions, mais toi tu n'es pas du genre à croire à des superstitions, alors tu ne peux pas être quelqu'un de religieux.

- Répétition (2.2.3). Si la propriété B appartient à la catégorie A, et que C appartient à la catégorie A, alors C a la propriété B. Sauf que la catégorie A n'a pas systématiquement la propriété B.

Ex : Si la personne qui a écrit Hamlet était un grand auteur, et que Molière est un grand auteur, alors il est la personne qui a écrit Hamlet.

Exemple plus courant : Si aller à l'église le dimanche est un truc de chrétiens, et que tu es chrétien, alors tu vas forcément à l'église tous les dimanches.

21 décembre 2012

Dis au revoir au Père Noël !

Puisqu'on a tous beaucoup à faire ces temps-ci, voici la version d'un poème de Glen Scrivener que j'ai traduit l'année dernière ici même sur ce blog.

J'espère qu'elle vous aidera à rappeler le sens de ce qu'on fête réellement, de manière créative et pertinente, au cours des longs dîners de Noël...

17 décembre 2012

Question complexe

Une forme voisine du faux raisonnement de question-piège est de poser une question qui implique une réponse complexe tout en exigeant une réponse simple et rapide. Bien sûr, on condamne l'interlocuteur s'il ne peut pas rapidement apporter de réponse simple.

Ex : Une amie chrétienne qui travaille comme serveuse se retrouve confrontée, au milieu de son service, à une question difficile, par une de ses collègues, non-chrétienne. "L'avortement, t'es pour ou contre ?". Cette amie a eu le bon sens de répondre que la question était complexe et méritait plus qu'une simple réponse à choix binaire. Si sa collègue avait condamné mon amie pour cette réponse, elle aurait commis le faux raisonnement de la question complexe.

Autrement dit, ce n'est pas parce qu'on nous présente un choix binaire qu'il faut l'accepter (et ça rejoint l'idée du faux raisonnement en noir et blanc).

14 décembre 2012

Un monde sans religion

Chassez le spirituel, il revient au galop. La Révolution Française a jeté à bas l'institution religieuse chrétienne, pour la remplacer immédiatement par le culte de la déesse Raison. Hegel, qui avait admiré en son temps cette Révolution, affirmait que le point culminant du progrès intrinsèque de l'Histoire serait le Weltgeist (“l'Esprit du monde”) – ou l'Esprit Absolu : Il prêtait à l'Histoire une volonté, un but conscient de liberté vers lequel elle tendait inexorablement.

Feuerbach quant à lui partit dans la direction opposée avec l'idée que l'Histoire est le développement de la matière, et non de l'esprit (ou de l'idée). Selon lui, la religion est simplement “le rêve de l'esprit humain”.

Karl Marx, influencé par Feuerbach, prôna un socialisme radical qui bannissait l'idée de Dieu. La religion n'était pour lui que “l'opium des masses”. De telles illusions devaient être éradiquées en faveur d'un monde rationnel où les hommes résolvent leurs problèmes sans intervention “extérieure”.

Une telle hostilité à la foi religieuse a pris forme physique en Russie après la Révolution de 1917. Le pays sera le cobaye du socialisme scientifique. Un ultime culte religieux fut célébré dans les murs du Kremlin en octobre 1917, et officiellement il n'y en aura plus jusqu'en 1990. A cette date, Mikhail Gorbatchev, alors chef d’État, déclarait que la Russie était en grave déclin spirituel.

En parallèle à un revirement politique récent vers le socialisme, on assiste aujourd'hui en France à un retour similaire au spirituel – si Dieu est mort, il est ressuscité. On peut, par la loi, imposer un cadre athée aux nations, mais on ne peut pas le vivre : les hommes ont toujours cherché Dieu aussi ardemment qu'ils l'ont fui.

10 décembre 2012

Exagération

L'exagération est un démon à mille visages : amplification, généralisation, caricature, dramatisation, victimisation, simplification, totalisation, etc. C'est un faux raisonnement qui étoffe les faits et l'environnement du raisonnement pour faire un raccourci jusqu'à la conclusion et ainsi éviter toute contestation.

Généralement exprimés sous la forme de vérités générales, sur un ton catégorique, et/ou comme un jugement péremptoire.

Ex : Avec toi, c'est toujours la même chose... peu importe ce qui vient après ça, la personne a déjà décidé que ce qu'elle vous reproche tombe dans la catégorie de ce qui a déjà été déclaré coupable chez vous, et fait donc l'économie du jugement, d'explications, bref, d'un procès équitable.

7 décembre 2012

La Bible est un lion

On entend dire que la Parole de Dieu n'a pas plus besoin d'être défendue qu'un lion en cage. Il suffit de relâcher le lion, et il se débrouillera très bien ! Tout dépend de ce qu'on entend par là. 

Il faut distinguer deux choses : ce que Dieu attend de nous parce qu'il en a besoin (rien!) et ce que Dieu attend de nous parce qu'il nous le demande. Évidemment que Dieu n'a pas besoin d'aide, et encore moins de la nôtre, mais pour une raison incompréhensible, il décide de nous demander de l'aide néanmoins. Il veut nous faire participer à ses projets.

Dire que la Bible n'a pas besoin d'être défendue peut inciter à penser qu'on n'a pas besoin de faire d'effort pour adapter l'annonce du message de Jésus à nos voisins, et l'expliquer. Ce serait comme de dire que Dieu n'a pas besoin d'évangélistes, ou que, puisque Dieu pourvoit, on n'a pas besoin de travailler. Dieu ne se contente pas d'objectifs, il pourvoit aussi les moyens de les atteindre, ou, comme on dit : Ce que Dieu ordonne, il le coordonne

Les moyens mis à disposition par Dieu sont entièrement cohérents avec les objectifs, et sachant que l'objectif ultime est de rendre gloire à Dieu et de trouver en lui tout son bonheur, il ne faut pas se contenter d'inaction en pensant que Dieu s'occupe de tout. Le monde est le chantier de Dieu, mais ce n'est pas le seul : chaque chrétien est également le chantier de Dieu, et c'est principalement en opérant dans et par ce second chantier (le chrétien) qu'il opère dans le premier (le monde).

La Bible est la parole de Dieu et en tant que telle, elle est la vérité. La vérité nous est donnée comme une flamme, une lumière qui permet d'éclairer le monde et de le comprendre. Et si cette flamme ne peut être éteinte, on peut néanmoins la recouvrir d'un seau. Défendre la Bible, c'est empêcher cela, pour qu'elle brille fort et loin à la vue de tous.

Comment procéder ?
La Bible elle-même nous incite à l'utiliser pour exposer la vérité face à l'erreur, mais pas n'importe comment (1Pi.3:15). D'abord, Dieu nous commande de répondre, pas de prendre l'initiative constamment, néanmoins il nous commande aussi d'être toujours prêts. Prenons donc l'initiative dans les raisonnements, mais pas forcément dans les discussions. Ensuite, il nous dit de répondre avec douceur et respect, il ne s'agit pas d'être sur la défensive ou de se lancer dans une discussion agitée. 

Dieu n'attend pas non plus de nous que nous convainquions qui que ce soit. Le but n'est pas de faire du prosélytisme. Nous pouvons être réfléchis, pertinents, logiques, en un mot convaincants, c'est là l'objectif, et non de convaincre en soi. C'est Dieu qui convainc. 

Enfin, il ne faut pas imaginer que de défendre la foi chrétienne implique une autorité autre que celle de Dieu et de sa Parole. On pense parfois qu'il faut que le chrétien et le non-chrétien s'accordent à débattre ultimement sous une autorité normative, extérieure, commune, comme la Raison humaine. Défendre la Parole de Dieu nécessite avant tout que notre esprit soit vivifié par Dieu, c'est de lui qu'il tirera sa vigueur, sa pensée et ses raisonnements. La raison est utile, c'est un outil sous l'autorité de Dieu, mais ce n'est pas l'autorité elle-même, car on ne peut soumettre à notre raison une entité qui lui est supérieure.

3 décembre 2012

L'absence de preuve

Comme on dit, l'absence de preuve n'est pas une preuve de l'absence. Mais il ne suffit pas de dire ça, car ce serait interdire tout esprit critique au nom d'une pseudo-liberté de croyance (qui ne serait qu'un caprice de l'imagination).

Par exemple, rien ne prouve que les licornes ne sont pas invisibles et intangibles - ce qui expliquerait pourquoi on n'a aucune preuve de leur existence. Mais il s'agit là d'une pure invention destinée à justifier un fantasme - on doit se poser la question : d'où vient l'explication ? Autrement dit, d'où viennent les bonnes raisons qui nous poussent à croire malgré l'absence manifeste de preuves ?

Pour prendre l'exemple qui nous intéresse ici, l'absence apparente de preuve de l'existence et de l'action de Dieu dans l'Histoire de l'humanité ainsi que dans la vie quotidienne ne constitue pas une preuve de son inexistence ou de son inaction. D'où en vient l'explication ? Du texte biblique, qui est une source historique fiable. Mais en plus de dire que Dieu est esprit (ce qui explique qu'on ne peut le percevoir comme on perçoit le reste du monde) et qu'il se cache (parce que sinon on mourrait à son contact), le texte biblique témoigne aussi de l'action de Dieu dans l'Histoire de l'humanité - et constitue alors une preuve. Mais on ne s'accordera pas sur ce point sans approfondir le débat.

Cela, pour deux raisons simples :

- D'une part, nous avons vu qu'il faut s'accorder sur ce qu'est une preuve,

- D'autre part, il se peut que le problème ne soit pas l'absence de preuve mais la diversité de nos interprétations de ces preuves, selon nos présupposés, et qui nous font penser que la bible prouve effectivement quelque chose, mais que ça n'a rien à voir avec Dieu.

Et ça, ça ne peut pas se faire ici, malheureusement. Seulement face à face arrivera-t-on à quoi que ce soit, car même si ma logique était parfaite, il faut plus que la logique pour convaincre les gens. Il faut du temps, il faut qu'ils voient la passion de l'orateur pour son sujet, il faut qu'il soit un témoignage vivant de son message. Il faut avoir de l'estime pour l'autre et une confiance personnelle, et il faut du temps. Alors je vous invite, chrétiens et non-chrétiens, à vous fréquenter et à dialoguer de tout ça, parce qu'au final, l'un de nos deux bords vit dans un mensonge, une illusion, et il faudra de l'aide pour en sortir.