16 août 2013

La mauvaise foi de l'incroyant

Selon un sondage IFOP de 2011, moins de 20% des Français se déclarent chrétiens pratiquants.

J'aimerais réagir à ça en trois mots.

Chrestomathie : ce qu'il est utile d'apprendre (du grec chrestos, utile et manthein, apprendre). Les sondages d'opinion n'en font pas partie. Ils visent généralement à influencer l'opinion publique plutôt qu'à la mesurer : il est toujours intéressant de voir comment les questions sont posées (dans le sondage cité, on insiste sur l'aspect personnel du rattachement à une religion... typique d'un pays républicain-laïque). Mais peu importe combien de gens prétendent que quelque chose est vrai si ça ne l'est pas, ou comme disait Michel Colucci : "C'est pas parce qu'ils sont nombreux à avoir tort qu'ils ont raison".

Notre société est pleine de personnes endoctrinées, victimes de l'opinion communément admise et des idées reçues, des gens qui croient ce qu'on leur a appris à croire, c'est-à-dire que nos croyances chrétiennes sont fausses, voire dangereuses. Ce faisant ils ne se rendent pas compte qu'ils ont eux aussi des croyances, ni de ce que ces dernière présupposent... et ça, c'est dangereux.

C'est dangereux parce qu'ils agissent comme s'ils étaient une majorité objective et impartiale, et donc habilitée à juger, et à condamner, là où nous ne sommes généralement considérés que comme des superstitieux prisonniers de nos croyances.

Christomachie : lutte contre le Christ (de christos, christ et macheia, combat). Ne pas croire en Dieu n'est une position neutre que si Dieu n'existe pas : si Dieu existe, il n'y a pas de position neutre, il n'y a qu'acceptation ou rejet. L'athée jugera bien sûr de la neutralité de ses croyances sur la base de... ses croyances, et il se trouvera forcément justifié dans son raisonnement. Mais plus encore, si Dieu existe, le non-croyant a au moins deux bonnes raisons de vouloir continuer à nier son existence :

  1. D'abord parce qu'en reconnaissant que Dieu existe, le non-croyant reconnaît l'existence d'un critère absolu de jugement qui lui est extérieur. Autrement dit, il perd l'autonomie de son jugement, il ne peut plus décider uniquement par lui-même du vrai, du faux, du bien, du mal, du juste et de l'injuste, il doit s'en remettre à Dieu. Or quel roi voudrait abdiquer son trône ?
  1. Ensuite, parce qu'en reconnaissant que Dieu existe, le non-croyant reconnaîtrait donc avoir usurpé en partie la place de Dieu en tant que juge suprême pendant un grand nombre d'années, s'exposant par là même à une punition légitime. Or quel coupable voudrait s'exposer à des poursuites judiciaires ?

Critomancie : verdict religieux du juge (du grec krites, juge et manteia, oracle). Comment résoudre le débat si tout le monde juge d'après ses propres croyances, qui l'arbitrera et quel sera le verdict ultime ? Mais cette question suppose que le croyant se trouve dans une position similaire à celle du non-croyant : est-ce le cas ? Il a beaucoup à gagner à réaliser son erreur si c'en est une, et ce d'après les critères qu'il accepte déjà (car comme il est écrit dans la Bible, si Jésus n'est pas ressuscité, notre foi est vaine). D'un autre côté il a aussi à y perdre : toute la cohérence de sa vision du monde. Sa situation est donc plus équilibrée que celle de l'incroyant.

Quant à juger de ses propres croyances, pour le croyant ou l'incroyant, c'est possible, mais il existe une autre méthode que le raisonnement circulaire : à supposer que la cohérence soit un critère de vérité, on peut chercher à vérifier la cohérence de son système de croyances et de sa vision du monde. Cornelius Van Til, grand apologète de la tradition Réformée, prétendait que seul le système chrétien était parfaitement cohérent en soi... (et on verra ça bientôt).

1 commentaires:

Thoar a dit…

« Rien n’est aussi désespérant que de ne pas trouver une nouvelle raison d’espérer. » Machiavel