1 décembre 2009

La psychologie de l'évangélisation

On pourrait penser qu'en changeant les idées des gens, on arrive à changer leurs actes. Mais combien de gens se disent convaincus - et le sont - qu'il faut faire quelque chose pour aider la planète ? Et combien le font ?

En étudiant la communication, on se rend compte qu'il y a plusieurs conditions qui font qu'on arrive a bien communiquer quelque chose aux gens.

Alors autant en prendre conscience, afin d'éviter de se retrouver à mal communiquer quelque chose à quelqu'un, ou même avant de se lui communiquer le contraire de ce que nous estimons bon pour cette personne. Exemple : votre amie a de mauvaises notes en maths, elle aimerait en avoir de meilleures. Vous l'engueulez, pour la motiver, mais elle le prend mal et rompt le contact avec vous. Vous lui avez communiqué votre message, mais ça n'a pas eu l'effet escompté, et qui lui aurait été profitable.

Dans tous les cas, il ne s'agit que de mieux contrôler l'influence que nous avons sur les gens étant donné les données culturelles et psychologique des gens (de la politesse en quelque sorte), et non pas de prendre les décisions à leur place. Revenons-en donc à nos moutons. La communication aux gens pour leur présenter l'évangile. Il ne s'agit pas de leur cacher nos intentions, au contraire. Cela consiste en plusieurs principes :

- Le cadre de liberté. Cela va de paire avec une déclaration d'intentions claire. Exemple : Des étudiants chrétiens vont dans un parc par un après-midi ensoleillé, et abordent un groupe de jeunes : "Bonjour, nous sommes chrétiens, nous voudrions partager notre foi avec vous, est-ce que ça vous dirait?". Les intentions sont claires, et les gens sont libre d'accepter ou de refuser. S'ils acceptent, alors ils auront pris la décision de s'intéresser à la chose, et ils seront bien plus ouvert à l'influence que vous aurez que si vous leur forcez un peu la main en vous imposant. S'ils refusent, vous évitez de perdre votre temps et le leur.

- L'engagement. Exemple : Vous invitez un ami à un événement chrétien, dans un cadre de liberté. Mais trop de liberté n'est pas toujours recommandé : si vous lui dites que l'évènement aura lieu à tel endroit à telle heure, et qu'il vient s'il veut, il aura peut-être envie de venir au moment où vous lui en parlez, mais plus tard, d'autres choses peuvent influer (humeur, etc.). Mieux vaut parfois lui proposer de prendre la décision au moment où il est le plus enclin à la prendre. Expliquez-lui ça clairement, et invitez-le à prendre la décision directement. Et une fois qu'il se sera engagé à venir, les chances qu'il vienne augmentent considérablement. Encore plus si l'engagement est public (cela demande plus de résolution de s'engager devant d'autres personnes). Notez deux choses: 1. Modulez votre façon de le présenter en fonction du degré d'intimité que vous avez avec la personne (Tu vas venir? Tu comptes venir? Tu penses venir?) et 2. Encore une fois que vous ne faites qu'influer sur le contexte de la décision, pas la décision elle-même, qui reste la sienne.

- L'acte préparatoire. Un autre moyen de proposer aux gens une orientation vers une identification particulière (qui leur correspond), c'est un acte préparatoire. Il faut que ce soit un acte peu coûteux en ressources (temps et efforts).

Exemple : Vous proposez un atelier sur la relation entre souffrance et spiritualité. Encore une fois, expliquez dès le départ et clairement vos intentions, et identifiez-vous. La personne participe à une petite activité, puis l'atelier se conclue par quelques questions sur la relation entretenue par la personne entre sa souffrance, celle qu'elle inflige aux autres, et sa spiritualité. La petite activité ludique "prépare le terrain" pour donner envie à la personne sondée d'aller plus loin.

- L'identification. Cela peut sembler tirer un peu vers la "vraie" manipulation - mais encore une fois ce n'est que difficilement le cas, comme je l'explique plus loin. L'identification est un principe selon lequel les gens agissent en fonction de ce qu'ils identifient comme leur ressemblant. On peut aussi appeler ça de l'édification ou de la flâtterie, selon la manière dont c'est utilisé.

Exemple : Vous faites la publicité d'un événement chrétien à une personne non-chrétienne en lui disant que vous lui en parlez parce que vous savez que c'est une personne ouverte d'esprit. La personne pourra alors s'identifier comme "ouverte d'esprit", ce qui accroît les chances qu'elle fasse un acte qui est "ouvert d'esprit" - à savoir, aller à cet événement chrétien.

L'important est que la personne s'identifie (d'elle-même ou parce que vous lui suggérez) comme ouverte d'esprit. Ce n'est pas une question de flatter les gens, mais de mettre en relation leurs idées/valeurs et leurs actes, de créer un lien entre les deux. Ce n'est pas "Tu es comme ça donc tu dois faire ça", mais plutôt "Puisque tu es comme ça, ça t'intéressera sûrement de faire ça". Ne suggérez pas à quelqu'un une identification qui ne lui correspond pas, ça ne marche pas (si les gens ont l'impression que vous leur avez forcé la main, ils seront très prompts à revenir sur leur décision).

- Le contact. Vous obtiendrez toujours des gens qu'ils soient plus honnêtes si vous établissez un contact direct avec eux : en les touchant (une main sur l'épaule ou l'avant-bras), en les appelant par leur prénom (plutôt qu'un "tu"), etc.

- L'influence minoritaire. On pourrait croire que d'aborder les gens dans une situation de force (ex : 2 chrétiens vs 1 non-chrétien) est un avantage. En fait, c'est plutôt un désavantage, le non-chrétien se sentira sous pression parce qu'il ne sera pas conforme à la majorité des gens autour de lui. La situation peut être désamorcée si l'un des chrétiens se rallie parfois à l'avis du non-chrétien, mais cela risque conforter le non-chrétien dans sa vision des choses, à laquelle il se rattachera de manière défensive. Dans une confrontation égalitaire (ex: 2 chrétiens vs 2 non-chrétiens), les gens risquent de se positionner dans une logique de débat : il faut avoir raison, il ne faut pas abandonner. La dernière technique, c'est l'influence minoritaire (1 chrétien vs 2 non-chrétiens). Les non-chrétiens, majoritaires, ne ressentirons aucune pression d'avoir raison puisqu'ils sentiront qu'ils font partie de la majorité. Ainsi ils seront beaucoup enclins à recevoir le message de la minorité. Pas immédiatement, par contre, puisqu'ils chercheront à garder cette majorité, mais votre message pénètrera librement dans leur esprit. Bien sûr, attendez-vous à être sous pression.

Voilà, c'est une panoplie de techniques pour mieux communiquer, appliquée à l'évangélisation. Pour vous donner une idée de la manière dont cette science peut être mal utilisée - même à de "nobles" fins - et donc ce que nous ne cherchons absolument pas à faire, voici mon expérience avec une association caritative.

Je vous laisse tout de même avec une question très importante : Ces techniques de communication ne prennent-elles pas la place de l'Esprit Saint au sein de l'évangélisation ? Je ne pense pas, mais les dérives possibles vers la manipulation, si. Et puis, elles iraient à l'encontre de ce en quoi on croit, en tant que chrétien.

PS : Merci à Tim et Camille pour leur apport dans la rédaction de cet article !

1 commentaires:

Caillou a dit…

C'est vrai que c'est très facile de tomber dans la manipulation.

Mais la question que je me pose, c'est est-ce que en cherchant des techniques efficaces d'approches, d'engagement, de communication, nous n'avons pas tendances à "bypasser" Dieu en se focalisant sur nous et nos capacité et à négliger notre dépendance à son égard ?

Mais est-ce que c'est une raison de ne pas s'intéresser à cet aspect ?

Mais maintenant que j'y réfléchis, je suis en train de me dire que même sans ces techniques on va de toute façon avoir tendance à compter sur nos capacités quelle soit évoluée, réfléchie ou pas.

Mais la connaissance de techniques de manipulation apporte quand même des tentations en plus, on peut très bien y recourir même inconsciemment. Donc danger donc entretenons notre relation de dépendance à l'égard de Dieu.